Les damnés de Paris

Paris, 1869, gare Saint Lazare, Constance Desprez descends du train qui l’amène de sa province normande. Elle est jeune, jolie et arrive sans contacts, sans point de chute, à la merci du premier malfrat venu.
Elle est à la recherche de son fils qui fut placé dans un orphelinat dès sa naissance.

Par olivier, le 11 mars 2014

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Notre avis sur Les damnés de Paris

L’histoire de Constance est à cette époque malheureusement classique, jeune fille de famille bourgeoise qui s’amourache à 16 ans d’un jeune noble. La bonne société de ce XIXème siècle ne peut tolérer cette situation et lorsque la jeune fille tombe enceinte, le fruit de leur amour est placé en orphelinat et la séparation des deux jeunes gens fait l’objet d’un sordide marchandage entre les parents.
Quelques années plus tard, au décès de ses parents, Constance n’a de cesse de retrouver l’enfant qui lui fut arraché. Tout ce qu’elle sait de lui, c’est qu’il a été placé dans un orphelinat parisien.
A peine descendue du train, elle se trouve confrontée à une canaille de la pire espèce mais, dans son malheur, Constance va faire la connaissance de Darius, jeune galopin, attachant et généreux gavroche, qui connaît Paris comme sa poche et qui se mettra à son service dans son enquête. Darius travaille entre autre pour André Gill, le caricaturiste, c’est ce dernier qui lui ouvrira les portes du Paris mondain où son fils pourrait avoir été adopté.

Constance, une comète qui traverse Paris et sa bouillonnante société intellectuelle et politique. A travers sa quête pour retrouver la trace de l’enfant qui lui a été enlevé c’est un regard sur le Paris de cette fin XIXème, le Paris d’Hausmann, une immersion totale dans une ville qui vit au rythme des chantiers et de ses petites traditions, des réceptions mondaines aux bas-fonds où trainent les bagnards.
C’est à une véritable enquête que doit se livrer la jeune femme, enquête compliquée par le fait que les orphelinats ne peuvent délivrer la moindre information. Seule solution, dérober le dossier de son fils. L’aide de Darius et de Gill qui en est tombé amoureux ne sera pas de trop.

Michael Le Galli inscrit ce drame qui aurait pu naitre sous la plume de Maupassant de Zola ou de Flaubert dans un Paris en pleine mutation, tant architecturale que politique. La ville est ici un personnage à part entière et Constance, Darius et Gill nous permettent d’en découvrir les différentes strates.
Avec Darius, c’est le Paris populaire, Gill le Paris mondain mais aussi politique et frondeur. Entre les gamins des rues et les connaissances de Gill que sont : Nadar, Zola, Gambetta ou Courbet, la vie parisienne est évoquée avec réalisme.

Maitrisant parfaitement la construction de son scenario, qui respire dans un magnifique 128 planches, il donne à ses personnages une profondeur, une existence qui prend tout son relief dans l’interaction des personnages entre eux, ils se répondent et s’enrichissent de leurs différences.

L’élégance du dessin de Marie Jaffredo, la légèreté de son trait enluminé de teintes douces, façonnent un album aéré et fouillé en même temps. Elle restitue la richesse de l’architecture, loin des grands monuments qui identifient une ville, elle s’attache aux rues, aux bistrots, à ces petits détails qui créent cette atmosphère merveilleusement rendue.
Riche d’une discrète inspiration iconographique, elle inscrit le récit dans le Paris de l’exposition universelle, des grands travaux d’Hausman mais surtout dans la quiétude du village de Montmartre, dans ces rues tout juste bousculées par le passage des fiacres.

Ce drame social et humain dans un cadre historique parfaitement documenté et restitué par ce grand conteur d’histoire qu’est Michael Le Galli et cette illustratrice de grand talent qu’est Marie Jaffredo est une très très belle découverte de ce début d’année. 

Par Olivier, le 11 mars 2014

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