Le gourmet solitaire

 
M. Inogashira travaille dans le prêt-à-porter. Il est importateur indépendant. Pour son travail, il est amené à effectuer de nombreux déplacements. Il n’emporte jamais avec lui un repas qu’il se serait préparé chez lui mais, en fin gourmet qu’il est, préfère aller au restaurant. Avec lui, nous visitons le Japon gourmand.
 

Par sylvestre, le 1 janvier 2001

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Notre avis sur Le gourmet solitaire

 
Mais comment vont-ils réussir à captiver l’attention des lecteurs avec des histoires culinaires ? Telle était un peu mon interrogation en abordant "Le gourmet solitaire". Jirô Taniguchi avait déjà dessiné "L’homme qui marche" ; le voilà qui dessine l’homme qui mange !

Qu’à cela ne tienne. Je dois vous avouer que la simple signature du mangaka m’a mis en confiance et, bien qu’en sachant que le sujet du récit serait loin de celui du "Sommet des dieux" qui m’avait fait connaître Taniguchi, j’ai plongé dans la lecture.

Dix-huit chapitres composent cet ouvrage. Chacun porte le nom d’un plat et d’un lieu. Un peu comme les notes d’un carnet de bord. Et chacun est une nouvelle indépendante se passant dans le lieu en question, et où Inogashira mange le plat cité. Le contenu de ses assiettes est toujours détaillé : composition, aspect, remarques d’Inogashira et même, le prix !

On a tous déjà mangé dans des restaurants. Dans des restaurants asiatiques, aussi – les japonais sont de moins en moins rares depuis une dizaine d’années. On a donc tous des références en la matière. Même si, il est vrai, l’intérêt pour nous, lecteurs européens, est aussi ce dépaysement qu’offre "Le gourmet solitaire".

Au-delà de cet apprentissage de la gastronomie japonaise (ou coréenne), ces historiettes nous font accompagner un Inogashira nous livrant ses pensées. Et quand ce gourmand gourmet observe, c’est une étude de l’Homme qu’il fait, pour ainsi dire. Une étude de l’Autre, de ses comportements, de son environnement, mais aussi de Soi. Ce qui se dit/lit est plein de choses si naturelles, presque banales, qu’on n’aurait pas osé en faire un livre ou une BD. Et pourtant… les auteurs l’ont fait, et ça passe bien !

Ainsi, on appréciera (car on se retrouvera en lui ?) quand Inogashira s’en veut d’avoir commandé en fonction de l’influence exercée par les autres ou par le lieu. On découvrira les différents types de gargottes du pays du soleil levant et leurs spécificités, les habitudes des Japonais, l’existence de restaurants servant toute la nuit durant… On rigolera bien, aussi, en lisant l’épisode de la "Boîte Bentô" ! C’est fou comme quoi à partir de « manger » on peut dériver sur l’analyse de plein de choses !

Le tout est raconté de manière bien agréable, agrémenté en début des chapitres par des annotations très intéressantes (ou à l’humour grinçant comme celle du chapitre 12 !) et est dessiné à merveille par le grand Taniguchi dont on (re)connaît le talent et le style. Un menu déroutant mais attirant comme un fumet envoûtant. Une lecture hors-norme aussi satisfaisante pour le curieux prêt à tenter l’aventure qu’une sortie de table après un fin (et maîtrisé) festin !

On note que les dernières pages de ce livre proposent une nouvelle du scénariste Masayuki Kusumi.
 

Par Sylvestre, le 11 décembre 2005

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