Las Rosas

Rosa est une jeune femme d’une vingtaine d’année, violée par son dealer elle est maintenant enceinte. Afin de la protéger le shérif du comté la conduit à Las Rosas, un groupement de caravanes autour d’une station-service à la frontière entre les Etats-Unis et le Mexique. Las Rosas abrite une petite communauté de femmes cherchant un nouveau départ, Rosa y arrive avec ses secrets, et elle va découvrir que Las Rosas possède aussi les siens…

Par melville, le 9 février 2011

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Notre avis sur Las Rosas

Enfin je découvre Las Rosas et avec lui un auteur au talent indéniable, Anthony Pastor. Roman graphique d’un peu plus de 300 pages, on s’imprègne doucement de son atmosphère singulière qui pendant les quelques jours de lecture et bien des jours après ne nous quitte plus, c’est comme si elle s’était tapis dans un recoin de notre esprit. Las Rosas est un livre qui marque, un récit qui s’ancre dans l’« être » du lecteur et qui fait désormais partie de ses souvenirs forts.

L’histoire de Las Rosas est complexe et tortueuse. Construite comme un huis-clos en pleine air, l’auteur instaure un décor fort qui fonde un des piliers du récit. Quelque part à la frontière entre les Etats-Unis et le Mexique – du côté mexicain – le camp de caravanes de Las Rosas abrite des femmes en mal de repères qui se sont regroupées pour former une petite communauté vivant en quasi-autarcie. Il fait chaud, très chaud même, l’atmosphère est moite et le paysage désertique. Marisol tient une station-service sur le bord de la route, un de ces stations-services que l’on trouve le long de ces routes sillonnant le désert américain… Marisol est une femme sombre qui semble cacher un lourd secret, elle attend le retour d’Angel. Retour que craint son père Pedro, que Flecha, le shérif bedonnant et alcoolique, rêve de coffrer une bonne fois pour toute pour le meurtre de la femme qui l’aimait, feu sœur de Marisol et mère d’Angel. Sans oublier les personnages de Rosa, de Yoli et les autres… Un peu à l’image du feuilleton à l’eau de rose « Valse d’amour » que les résidentes de Las Rosas suivent avec assiduité, Anthony Pastor nous raconte une histoire qui emprunte les mêmes ressorts scénaristiques mais auxquels il insufle une virtuosité sans égale et une touche de surréalisme. L’auteur entretient et cultive le mystère jusque dans les dernières pages, il maîtrise l’art de la subjectivité avec une vraie aisance, et sans en dévoiler beaucoup sur chacun de ses personnages on se sent pour autant très proche d’eux. A son intrigue sentimentale, il mêle un fond de polar qui terminera d’emporter les plus indécis. Superbe ! Tous les personnages, même les plus secondaires, sont fouillés et on a l’impression que l’auteur leur a écrit une histoire propre a chacun : un sentiment qui leur donne une densité, du corps.

D’un point de vue plus « technique », Anthony Pastor met en scène son récit avec un soin tout particulier apporté aux cadrages et plans de vue. Sa narration est fluide et scandée par la voie off d’un narrateur omniscient, elle saisit le lecteur et ne le lâche plus.
Côté dessin, Anthony Pastor adapte son trait à l’histoire qu’il veut raconter. Il opte pour des noirs massifs qui structurent son dessin (procédé qui n’est pas sans rappeler celui d’Hugo Pratt) sur lesquels il superpose des plages de gris à la trame « grossière ». Le rendu final est d’une justesse de ton impressionnante, on ressent bien à la fois toute la puissance du récit mêlé à cet aspect plus « populaire ». Du très beau travail !

Western moderne et tragique, Las Rosas d’Anthony Pastor, envoûte et emporte le lecteur dans un récit riche. Un livre rare et précieux. Un must à naturellement posséder d’urgence.

Par melville, le 9 février 2011

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