L'innocente

Au début de l’année 1945, afin de préserver l’avenir du III Reich et de la race aryenne, les jeunes femmes allemandes composant les jeunesses hitlériennes se préparent à être transférées au plus loin du front en Bavière. Nina Reuber, qui fait partie de celles-ci, est appelée par sa supérieure qui lui apprend le décès dramatique de ses grands-parents à la suite d’un bombardement aérien. Ne souhaitant pas partir avec ses pairs, Nina décide, avec l’appui de son amie Lisel, de rejoindre sa tante à Berlin. Grimée comme un garçon, la jeune fille est adoptée par une escouade de soldats US qui l’amène jusqu’aux portes de la capitale germaine. Lors de son périple qui lui permet d’assister de près à la déchéance du régime nazi, elle rencontre Wim, prisonnier de guerre allemand, qui lui donne l’occasion via un petit mot à sa mère, .de trouver un toit et un travail. Témoin du partage de la capitale et de sa renaissance, Nina va vivre des moments intenses qui vont indubitablement égratigner son innocence.

Par phibes, le 5 mars 2015

Publicité

Notre avis sur L’innocente

Sous le couvert de sa collection Signé, les éditions Le Lombard remettent au goût du jour cet album paru initialement chez Casterman/Studio (A suivre) en 1991 et concocté par un duo qui a depuis, au travers de nombre d’ouvrages marquants, confirmé son association très complémentaire.

C’est donc sous l’égide d’un premier de couverture original qu’Éric Warnauts et Guy Raives nous livrent leur récit qui a l’avantage de mêler Histoire et destinée d’un couple de personnages charismatiques, dans une romance subtile et dramatique. N’échappant certes pas à un certain conventionnalisme, il n’en demeure pas moins que les vicissitudes de la belle Nina se découvrent avec un certain intérêt.

Au moyen d’une voix-off explicite et pour le moins documentée, les coauteurs ont décidé de bien cadrer la fiction liée à Nina. Les effets didactiques sont immédiats et permettent d’assimiler nombre de faits qui se sont déroulés durant la période historique retenue (la chute de Berlin lors de la seconde guerre et sa sectorisation) dans une chronologie authentique. Malgré tout, cette effusion de faits historiques aura pour conséquence de casser un tantinet le rythme de la fiction entourant Nina et de rendre abruptes les transitions. Sur ce dernier point, il ne fait aucun doute qu’au travers des différentes étapes historiques, le récit fait ressentir indubitablement la profonde mutation caractérielle de la jeune allemande en femme avérée (sa perte d’innocence) et ce, à la faveur de moult instantanés auréolés d’une certaine intrigue sentimentale qui ont le mérite d’être bien choisis.

La partie graphique est de toute beauté. Il va de soi que le réalisme très convaincant auquel s’adonnent les co-auteurs porte significativement la romance de Nina et de Wim. Ponctué d’une pointe d’érotisme enchanteur, ce choix d’évocation tout en élégance se joue très habilement des personnages et surtout de leurs attitudes et de leurs regards qui, à n’en pas douté, ont quelque chose de profond. Pareillement, pour les décors, l’on perçoit très facilement que des efforts documentaires ont été faits pour décrire Berlin dans cette période troublée.

Une réédition profitable pour ceux qui auraient raté la première publication et qui permet de lancer un personnage tout en féminité à retrouver également dans le diptyque L’Après-guerre édité dans la même collection Signé.

Par Phibes, le 5 mars 2015

Publicité