Le jour du marché

Sa femme allait accoucher ce jour-là, mais malgré tout, Monsieur Mendleman est parti dès le petit matin au marché avec huit tapis à vendre. Tout aurait dû se passer comme d’habitude pour lui là-bas, mais le négociant à qui il vendait d’ordinaire ses tapis avait sans préavis cessé son activité et son successeur ne voulait pas de tapis confectionnés main comme Monsieur Mendleman en avait depuis toujours à proposer. Et personne d’autre pour les lui prendre…

La rituelle journée au marché tournait donc brutalement à l’épreuve angoissante pour Monsieur Mendleman dont la famille s’agrandissait en même temps que la régularité de ses revenus se voyait menacée…
 

Par sylvestre, le 2 novembre 2010

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Notre avis sur Le jour du marché

Ce très bel ouvrage avec couverture partiellement toilée et titre en lettres dorées est la triste chronique d’un jour pas comme les autres pour Monsieur Mendleman, artisan tisserand émérite, qui d’un seul coup d’un seul va être bousculé dans ses rassurantes habitudes.

"Un être vous manque et tout est dépeuplé"… C’est une phrase qui résumerait bien la mauvaise surprise du héros de Le jour du marché que l’on va accompagner, témoins de sa malchance. Dès les premières vignettes, le ton est donné : triste, et renforcé dans ce sens par un choix de couleurs très ternes, très sombres. Et des planches composées de manière très austère… Nous sommes, précisons-le, dans un coin de l’Europe de l’Est au début du vingtième siècle, avec tout ce que cela peut comporter comme clichés sur la pauvreté et sur le poids qu’elle pèse dans une vie de labeur. Sur un climat rude, aussi, ou sur des lendemains pas forcément chantant…

Monsieur Mendleman n’avait pourtant pas de raisons de paraître si abattu, ce fameux matin-là… Sinon celle de devoir laisser sa femme enceinte et prête à accoucher alors que sa place de futur père aurait dû être à côté d’elle. Il la laissait en tout cas avec la promesse de revenir en père heureux, et partait pour sa journée de travail qui en tout point devait ressembler à celles qu’il avait connues jusque là : propice à faire des affaires, à échanger le fruit de son travail de qualité contre l’argent qui lui permettait de vivre.

Les choses en ont été autrement pour le tisserand, et l’auteur américain James Sturm nous l’a montré tombant de plus en plus dans le désespoir et troquant ses enclins d’artiste à la poésie contre des idées noires sur le chemin du retour. Scénario "coup de massue" ou "gueule de bois", selon comment on peut accuser le coup, le récit prend fin avec une amertume teintée d’un espoir incertain en l’avenir ; mais d’un espoir malgré tout. Sombre, vous disais-je… Tout en ambiances… C’est Le jour du marché, une histoire de chute, une histoire comme on préfère qu’il n’en arrive qu’aux autres mais surtout un merveilleux roman graphique à découvrir dans la collection Outsider des éditions Delcourt.
 

Par Sylvestre, le 2 novembre 2010

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