Je vais rester

 
Fabienne et lui venaient tout juste d’arriver à Palavas où ils devaient passer quelques jours de vacances quand le vent s’est mis à souffler très fort et a emporté une plaque de tôle qui, en retombant, a décapité Roland ! Net.

Le choc fut terrible, indescriptible ! Mais contre toute attente, Fabienne a finalement décidé de ne rien annuler. Plutôt que de se plier à ce qu’il convient de faire dans ces cas-là (chagrin, paperasse, dépression…), elle a choisi de vivre les moments que Roland avait programmés pour eux. Jusqu’à cette date où, dans leur agenda, le mot "surprise" était noté après une réservation au restaurant…
 

Par sylvestre, le 12 mai 2018

Notre avis sur Je vais rester

 
On peut avoir des pépins, en vacances : un retard, un pneu crevé, un problème sur le lieu de résidence… Mais quand c’est la mort qui est au rendez-vous, la donne est toute autre et les souvenirs bien moins heureux. C’est ce qui va arriver à Fabienne : elle va perdre son compagnon au tout début de leur séjour à Palavas-les-Flots dans un imprévisible accident.

Extrêment choquée, Fabienne va pourtant se montrer distante de manière quasi incompréhensible. On va même se demander dans quelle mesure elle n’est pas contente, quelque part, que le drame ait eu lieu ! Une petite larme, un petit mensonge par téléphone aux parents de Roland. Et puis c’est tout ! Fabienne vaque ensuite aux occupations qui étaient prévues au programme : spectacles, activités, promenades ! On a du mal à la cerner, à comprendre comment elle peut s’être détachée du malheur qui est tombé sur son couple et qui a sonné son terme. Et ce n’est qu’en suivant Fabienne dans cette étrange parenthèse en bord de mer qu’on va se faire à l’idée que son choix était finalement pas si irrespectueux, pas si incompréhensible, pas si irréfléchi…

– "Fais-le pour lui !"
– "Il aurait tant aimé que tu vives tout ça !"
Des phrases comme ça, on les entend dans des films quand un héros meurt et qu’il laisse derrière lui des gens qu’il aime et à qui il demande de ne pas se laisser emporter par le chagrin. Mais… Et dans la vraie vie ?! Comment réagirait-on ? Ferait-on comme si rien ne s’était passé ? Avec un regard qui ne juge pas, Lewis Trondheim et Hubert Chevillard apportent leur réponse à ces questions. Ils opposent la luminosité du ciel estival de Palavas à la tristesse des faits. Ils compensent la solitude de Fabienne par la rencontre qu’elle fait avec Paco. Ils permettent à leur héroïne de papier de ne pas tomber dans un chagrin immédiat : Fabienne aura assez le temps plus tard pour que le chagrin la rattrape et la submerge ! Ils lui offrent de pouvoir tourner la page de manière douce et maîtrisée. La perte n’en est pas moins douloureuse, mais l’acceptation n’est-elle pas meilleure thérapie que la soumission à l’effondrement ?

Une histoire est tellement plus touchante et il est tellement plus facile de s’identifier à eux quand les protagonistes sont nos semblables ! Avec Je vais rester, Lewis Trondheim et Hubert Chevillard nous racontent un fait divers dramatique mais réussissent à lisser la gravité des faits par la dignité de la principale victime. C’est dérangeant, c’est terrible, mais n’est-ce pas beau, au final ? Un extraordinaire exemple de (sur)vie à découvrir aux éditions Rue de Sèvres…
 

Par Sylvestre, le 12 mai 2018

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