JE, FRANCOIS VILLON
Bienvenue parmi les ignobles

Depuis le massacre du 9 mai, Villon s’est retiré de la vie agitée des étudiants du quartier de la Sorbonne.
Lorsque Colin de Cayeux, le roi des Coquillards, vient à sa rencontre, il ne peut s’empêcher de lui proposer ses services. Toute chose à un prix, pour entrer dans la fraternité et devenir le poète du roi des coquillards, il devra réaliser deux chefs d’œuvres ignominieux et offrir en guise de bienvenue ce que la confrérie lui demandera.

Par olivier, le 5 octobre 2014

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Notre avis sur JE, FRANCOIS VILLON #2 – Bienvenue parmi les ignobles

François Villon s’engage alors encore un peu plus dans l’abject. Il accepte le marché de Colin et va, pour satisfaire au rite d’intronisation, commettre un vol scandaleux, un crime écœurant et offrir ce qu’il a de plus cher à son cœur : sa chère Isabelle.

En ce Paris du XVème siècle où les larrons côtoient les bourgeois dans une ville aux limites encore restreintes, François Villon s’acoquine avec les plus odieux des écorcheurs, bande errante de mercenaires sans maitres qui vit sur le dos de la population. D’étudiant aux plaisanteries douteuses frôlant souvent la limite de la moralité et du droit, il plonge sans remords ni compassion dans le crime.

Le second volet de l’adaptation du roman éponyme de Jean Teulé par Luigi Critone ne dément pas les promesses du tome un. Cette plongée dans la vie et la légende du poète est tout simplement magnifique et effroyable.
Tout ce qui fut à l’origine, tout ce qui a nourrit les merveilleux vers de la balade des pendus est bien là, terrible et ignoble, mais que serait Villon sans cette plongée dans l’haïssable.

Rythmé par les événements dont la trace est parvenue jusqu’à nous, comblant les manques avec une inspiration qui reste au plus près de ce que l’on sait du poète, Luigi Critone dresse un portrait le plus fidèle possible de Villon.
Celui dont le père fut pendu, dont la mère fut enterrée vive par la justice du Roi, aurait pu, malgré tout, avec l’aide bienveillante et avec l’éducation prodiguée par son tuteur devenir malgré tout un homme de bien.
La violence de l’époque, l’attrait du plaisir facile, une étrange folie qui habite Villon et qui l’entraine de plus en plus loin dans le crime aura raison de la bonté du Chanoine qui le recueilli.

Villon part très tôt du côté obscur, puisant la richesse et la puissance de sa poésie dans la fange et l’infamie.

Tout le talent de Luigi Critonne dans l’illustration de cette vie de débauche est de suggérer plutôt que de montrer, aucune scène violente ne viendra vous heurter, tout es dans le cadrage et pourtant on ressent toute la douleur des innocentes victimes, l’incompréhension dans leur regard et le cruel détachement de Villon qui, s’il a bien un léger sursaut de révolte devant le viol d’Isabelle accepte très vite cette dernière épreuve d’initiation.

Etrange homme que ce poète, qui choisit le crime à une vie bien rangée mais dont les vers sont encore chantés par Lavilliers ou Ferré.

Un album magnifique où la sensibilité et l’émotion priment et où malgré ses choix odieux, Critone parvient à ne pas nous faire rejeter Villon en qui il décèle encore un peu d’humanité.

Par Olivier, le 5 octobre 2014

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