Hypericon

Teresa Guerrero est étudiante en archéologie. Ayant obtenue une bourse d’étude pour un emploi d’assistant scientifique, elle est partie à Berlin pour préparer une exposition sur le trésor de Toutankhamon. Volontaire et débrouillarde, la jeune femme savoure son choix et se met en quête d’un logement. C’est lors d’un déplacement en car qu’elle tombe inopinément sur Ruben, de souche italienne comme elle. Subjuguée par sa personnalité opposée à la sienne et son originalité débordante, elle le suit et finit par tomber amoureuse. Malheureusement, ce bonheur express n’apaise pas ses problèmes d’insomnie. Aussi, chaque nuit, elle se réfugie dans les écrits d’un autre temps, celui d’Howard Carter lors de la découverte, en novembre 1922, du fabuleux trésor de Toutankhamon.

Par phibes, le 27 novembre 2022

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Notre avis sur Hypericon

A la tête d’une jolie bibliographie primée à plusieurs reprises (comme Cinq mille kilomètres par seconde, prix du meilleur album au festival d’Angoulême) et à la suite de Celestia paru en 2020, l’illustrateur italien de renom Manuele Fior nous invite à le retrouver dans une nouvelle histoire ayant trait au parcours d’une jeune étudiante à la destinée bousculée par une rencontre hors norme.

Se nommant Teresa, cette dernière nous ouvre intégralement son intimité, et par cela, nous sensibilise sur son histoire d’amour avec Rubens, un Italien original rencontré par hasard au gré de ses déambulations berlinoises. Le fruit de cette rencontre perturbe la rectitude de la trajectoire à laquelle Teresa se vouait et prend des proportions qu’elle se doit d’assimiler. On y découvre que la jeune femme, insomniaque, mène une double vie puisque la nuit, son esprit s’égare cent ans plus tôt dans les fouilles archéologiques de la Vallée des Rois.

Le récit nous entraîne dans une évocation à taille humaine sur deux époques, distantes de quelques quatre-vingts années et très différentes l’une de l’autre. Teresa assure le rôle de bascule entre les deux selon une situation précise. Il en résulte une lecture à rebondissements, finement réglée, qui a l’avantage de nous faire gouter à travers le texte du journal de Carter la fièvre d’une découverte archéologique et en parallèle la désinvolture d’un jeune couple qui se découvre avec ses bons et mauvais moments. De fait, Manuele Fior fait du bon boulot dans cette narration alternée. Tout en marquant des points sur les deux tableaux, il trouve le juste équilibre pour rendre ses personnages attachants, en particulier Teresa, toute en fragilité, dans son rapport si particulier avec Ruben, et qui semble chercher sa destination avec en ligne finale le fameux Hypericon.

Au niveau des dessins, Manuele Fior démontre une fois encore ses talents d’illustrateur. Sans pour autant chercher un réalisme outrancier, l’artiste gère subtilement son trait et sa colorisation à la faveur d’une douceur des plus agréables. Considérant l’entrecroisement des deux époques, il fait en sorte de jongler sur deux styles un peu différents, l’un (la quête de Carter) plus picturale, l’autre (l’existence de Teresa) plus moderne, plus crue à certains moments juste pour jouer sur l’intensité. Le travail est indéniable également sur l’expressivité de ses personnages comme Teresa et Ruben qui, chacun, se révèle dans leur caractère très différent et somme toute complémentaire.

Une bien belle histoire d’amour sur fonds de découverte historique qui a le privilège d’être temporellement épanouissante.

Par Phibes, le 27 novembre 2022

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