Un homme est mort

Brest 1950.
Au lendemain de la guerre, il ne subsiste rien de la ville. Les bombardements et les combats ont tout détruit. Il faut reconstruire et la ville devient un immense chantier. Des milliers d’ouvriers travaillent à cette reconstruction.

Avril 1950 : cela fait un mois que les ouvriers font grève : ils réclament de meilleurs salaires. Les ouvriers sont rejoints dans leur combat par les dockers, les traminots et ceux de l’arsenal. De nombreuses manifestations ont lieu.
Le 17 avril, une grande manifestation doit avoir lieu. Elle sera interdite par les forces de l’ordre. Les affrontements entre manifestants et gendarmes seront rudes, jusqu’à ce que les gendarmes ouvrent le feu sur les ouvriers. Quelques-uns seront blessés, un homme sera touché en pleine tête. 

René Vautier est un cinéaste engagé, qui vient de faire un film Afrique 50, qui le verra condamner en France. Il est en Irlande lorsque les syndicats lui demandent de revenir à Brest pour filmer cette lutte. Il revient clandestinement en France et filmera ces jours sombres sur Brest avec un film qui a disparu depuis : Un homme est mort.

Par berthold, le 1 janvier 2001

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2 avis sur Un homme est mort

Je ne sais comment commencer pour vous parler de ce livre, tant que je suis encore sous le coup de l’émotion.

Un homme est mort, le livre, est un choc. 
Un chef d’oeuvre. 
Le livre qui doit être montré à tous et à toutes pour ne pas oublier, ne pas oublier cette lutte menée par des hommes pour avoir droit à de meilleurs conditions, et pour ne pas oublier cet homme,  Edouard Mazé, mort ce jour funeste d’avril 1950 alors qu’il maniféstait et qui fut touché par une balle tirée par les gendarmes. 

Kris a porté ce livre en lui pendant plusieurs années, comme on l’apprend dans le dossier à la fin.Le scénariste du Déserteur (Delcourt), de Le monde de Lucie (Futuropolis) nous raconte, avec émotion, comment est né ce projet, son envie de raconter cette histoire, la déception de ne pouvoir le faire et l’aboutissement de cette aventure. 

Aidé par un Etienne Davodeau au dessin qui nous permet de découvrir un superbe travail. Je connaissais Davodeau de nom jusqu’à aujourd’hui, n’ayant rien lu de lui. Je découvre un dessinateur très talentueux et un auteur à suivre. 
Ses planches sont de toute beauté. Quel travail sur les couleurs, le réalisme, et avec quelle sobriété il fait passer l’émotion dans son dessin ! Juste un regard, une posture : 4 cases sans texte page 17, par exemple.
J’ai eu aussi la larme à l’oeil par moment. Lorsque P’tit Zef dit le poème de Paul Eluard à sa façon (page 56 et 57). C’est une très grande scène, une très belle scène. 
Regardez la, regardez le P’tit Zef déclamer son texte,  n’est ce pas une scène superbe?

Mais tout ce livre, ce document, est un chef d’oeuvre. Une oeuvre ayant sa place dans toute bonne bibliothèque, dans les écoles, lycées… Le film de René Vautier ayant disparu cette année-là à force de diffusion sur les chantiers, je crois que ce livre le remplacera. Comme le dit Vautier à la fin : " je pensais vraiment qu’il ne reverrait jamais le jour… et je n’aurai jamais imaginé que ce serait sous la forme d’un livre de bande dessinée.".
J’ai aussi découvert un personnage (parmi tant d’autres dans ce livre), c’est donc René Vautier, ce cinéaste engagé et qui continue aujourd’hui encore à filmer de par le monde et à dénoncer ce qui le révolte. René Vautier est le réalisateur du film Avoir 20 ans dans les Aurès, par exemple.

Je tiens à remercier Kris et Davodeau pour nous avoir offert ce récit, de nous avoir offert une grande oeuvre que, même la dernière page refermée, nous ne sommes pas près d’oublier.
Merci.

Par BERTHOLD, le 16 octobre 2006

Un homme est mort et tout bascule. D’un mouvement de grève, on passe au drame. Un innocent tombe sous les balles d’un flic, il était là pour soutenir ses camarades, il y laisse la vie. La scène se passe à Brest, nous sommes le 17 avril 1950 en pleine reconstruction de l’après guerre. L’environnement géopolitique est à la guerre froide.

Tel un film qui tourne au ralenti, le son distordu, l’image s’arrête, gros plan sur une case, pour mieux prendre en considération l’impact du désordre :  Il tue ! 
Cette affaire aurait pu être oubliée s’il n’y avait dans le milieu de la bande dessinée, Kris au scénario de cet album, avec la volonté de redonner à certains l’image qu’ils méritent. Et parmi eux , un certain Guy Hennebaut, acteur du mouvement, résistant durant la guerre de 40 et grand père de Kris. L’impulsion donnée il ne reste plus qu’à créer le bon parcours pour ce livre.

Les différentes rencontres se font au fur et à mesure que les années passent mêlant passions et souvenirs et finalement un projet de bd naît. Pourquoi ? Car il ne reste rien du film ni de la bande son enregistrée à part et mettant en scène le poème de Paul Eluard au titre éponyme. 
L’époque est ingrate, les hommes se battent, il ne reste rien. Pourtant le destin de Mazé et de sa courte vie n’est pas terminé pour autant et son histoire, racontée par ses amis, son enterrement filmé par René Vautier, est ainsi reprise et adaptée par Etienne Davodeau déjà sensibilisé par le militantisme (ref : Les mauvaises Gens – Delcourt ). Il en assure la co- écriture et le dessin. Les couleurs sont admirables, justes, dosées, appuyant toutefois les bruns et les noirs décrivant l’ambiance tout aussi bien que le dessin.

Le livre est magnifique comme d’habitude chez Futuro. Le prix est très abordable pour la qualité, le nombre de pages et le dossier associé créditant et documentant les propos de la bande dessinée. Superbe album pour un récit tragique et belle leçon d’histoire à ne pas manquer pour apprendre et connaître le sujet, le milieu, les hommes.

Cette aventure éditoriale est assez exceptionnelle au vu du nombre des participants à sa réalisation. La bande dessinée montre encore son potentiel de créativité au niveau des codes narratifs en passant par la pédagogie, le travail en collaboration et la possibilité de faire un travail de mémoire de grande qualité. Admirable, à découvrir.

Par MARIE, le 16 octobre 2006

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