Heureux qui comme

Cela démarre à l’aéroport. Une femme à l’air un peu perdue, attend son vol. On comprendra qu’elle fuit l’Occident et sa relation amoureuse pour chercher des réponses ailleurs, et changer d’air. Direction l’Afrique. Là-bas, un homme est installé avec sa famille : sa femme et ses deux filles. Il travaille dans une compagnie minière et n’éprouve guère de culpabilité à exploiter les terres africaines et détruire sauvagement ses villages. Deux personnages que tout oppose sinon qu’ils sont l’un et l’autre complètement pommés. Le premier découvrira un monde auquel il ne s’attendait pas, tandis que le second n’a jamais cherché à le comprendre. Deux personnages que le hasard fera se rencontrer.

Par Placido, le 15 janvier 2013

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Notre avis sur Heureux qui comme

Nicolas Presl revient chez Atrabile et histoire de ne pas changer les bonnes vieilles habitudes, c’est une BD muette. Mais cette constance dans le muet n’est pas synonyme de stagnation, Nicolas Presl évolue et renouvelle sa technique de narration. Pousser toujours un peu plus loin le suggestif et s’éloigner de l’illustratif, dire les choses sans les dire et montrer les choses sans les montrer. Et la réussite va plus loin, car au travers de son dessin toujours autant taillé à la serpe, rempli de ses profils bizarres, il y a une ambiance. Une ambiance très présente, palpable, qui élève cet Heureux qui comme un peu plus haut…

Ce n’est pas tellement l’histoire en elle-même qui est importante. Car même si elle aborde des sujets sensibles d’Afrique et que l’on retrouve un côté « engagé » très clair, il n’y a pas sur le plan strict du scenario, de grande originalité. L’intérêt de la BD se trouve dans la retranscription des émotions, dans l’errement des personnages, ces expatriés qui ne sont pas vraiment à leur place et qui luttent vainement pour se sentir en paix. Car que ce soit à travers le travail ou les vacances, l’exploitation du pays ou la découverte du pays, il s’agit bien là d’un errement. Social et spirituel.

Leurs divagations sentent la sueur et la fumée de cigarettes, prennent la forme d’hallucinations bactériennes. Leurs divagations les amèneront aussi à se rencontrer, le hasard faisant parfois bien les choses. Deux âmes en peine, perdues, qui viennent à se tenir compagnie dans cet autre monde, cette autre dimension, dépourvue de repères spatio-temporelle. Un peu comme s’il vivait une aventure fictionnelle. Le retour à la réalité, qu’il soit désiré ou craint, sera dès lors, inévitablement un peu brutal.

Première utilisation de la couleur dans un de ses livres, elle occupe une place importante, déjà esthétiquement, car les contrastes et les nuances sont superbes, le trait fin de Nicolas Presl faisant des merveilles dans les cases très chargées, bourrées de décors. Mais la couleur porte également un sens narratif, avec une opposition couleurs chaudes/froides, Afrique/Occident, rêve/réalité…

Heureux qui comme Ulysse, a fait un beau voyage. Oui, pour nous c’était très bien, merci.

Par Placido, le 15 janvier 2013

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