Hard Boiled

Son nom c’est Nixon, il est contrôleur des impôts. Il a une vie tranquille, une femme, deux gamins et un chien, il ne demande donc rien de plus, juste faire son boulot et rentrer le soir pour retrouver sa famille.

Seulement voilà, régulièrement ses « missions » dégénèrent, les engins explosent, les balles volent et il n’arrive à garder son équilibre mental qu’en se répétant sans cesse « Mon nom c’est Nixon, je suis contrôleur des impôts… »

Nixon, ou plutôt « Unité 4 », ne sait donc pas qu’il n’est en fait qu’un robot, que tout ce cirque familiale n’est qu’un leurre, que dans l’ombre ses concepteurs l’observent, le récupèrent si besoin est et le réparent pour qu’il puisse tranquillement retourner dans cette vie paisible.

Et au cours de ces « batailles » il finit par découvrir, sans vouloir vraiment l’accepter, la vérité.

Il n’est plus Nixon, il n’est plus, non plus, Harry Seltz, ni Carl, mais juste cette Unité 4…

…Il aimerait tellement se contenter de rentrer chez lui, pour juste être tranquille…

Par fredgri, le 1 janvier 2001

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Notre avis sur Hard Boiled

« Hard boiled » nous entraîne dans un monde futuriste, cyber-punk ou les grandes corporations s’affrontent impitoyablement pour garder leur marché, la société de consommation s’immisce partout, déforme les besoins du citoyen, pousse vers l’indifférence, la mécanisation et le besoin de se créer une cellule familiale stable pour avoir un repère.

Miller se lance donc dans une critique très cynique de cette société, de ces hommes machines qui obeissent et se bornent à ne faire que leur boulot tout en entretenant une sorte d’esprit compétitif, du mordant, de la rage. Les balles qui volent, les bras coupés qui dansent ne sont que les reflets des moyens, chaque jour, plus agressifs pour avaler l’autre et être le meilleur.

Le héros de « Hard boiled » ne se rend compte de rien, il suit son programme, se berce de ses illusions et sourit quand la porte de sa maison s’ouvre sur le visage de sa pseudo-femme. Ces hommes ne demandent donc rien de plus, rester dans le système, s’y complaire, ne pas être dérangés et pouvoir simplement boire sa bière devant un match de foot.

A chaque dérapage les choses s’arrangent, se replient et le bouton reset est réactivé !

Si Miller porte un regard très dur et désenchanté sur ce système c’est davantage parce que ce dernier fonctionne en autarcie complète, qu’il se construit sur ses propres théories et qu’il n’accepte aucune autre doctrine. Son héros est une créature perdue d’avance avec une mémoire sans cesse réécrite, qui n’a d’autre ambition que celle entrée dans ses circuits, à sa conception. Au vue de certains évènements militaristes récents, on se rend compte que le message peut aussi est ramené sur un propos plus anti-américaniste. Nixon représente alors l’instrument parfait d’une multinationale impérialiste qui tend à vouloir avaler les concurrents tout en manipulant l’image qu’elle donne et la mémoire de ces « employés » ! (Vous avez lu « 1984 », on n’est pas très loin de cette vision). Cet « employé » utilise donc tout les moyens qu’il a sans se poser de question sur les conséquences, après tout tout se justifie et qu’importe…

Ce genre de thématique est assez récurent dans l’oeuvre de Miller, peut-être se répète t il un peu d’ailleurs, néanmoins elles sont suffisemment en dehors des sentiers battus pour être soulignées.

Et qui mieux que Geoff Darrow pouvait servir graphiquement ce propos ? Chaque planche explose de mille et un détails tous plus barrés les uns que les autres, des foules qui font leurs courses, des inconnus qui copulent dans un coin de case, des flingues qui crachent des millions de balles… Le monde de Darrow est un monde de folie visuelle qui nous emmène vers des territoires ou se mélangent fantasmes d’adultes, références enfantines et autres Godzilla en plastique. Mais cette avalanche de détail ne provoque pas que la fascination et les rires, on en ressort, parfois, avec un goùt fade sur la langue, mal à l’aise devant cette débauche qui fourmille dans tout les recoins. C’est certainement la raison qui a poussé les créateurs de Matrix à l’engager pour s’occuper du design des machines et de leur monde !

« Hard boiled » est donc un album qui peut se lire comme une vulgaire histoire de bourrin mais qui laisse aussi entrevoir un discours bien plus catégorique, sans concession !

A lire pour se poser plus de question…

Par FredGri, le 16 janvier 2005

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