HÄGAR DÜNOR
1973 - 1974

("Hagar the Horrible (The Epic Chronicles) – Dailies 1973–74")
Créé par Dick BROWNE en 1973, Hägar Dünor ("Hägar The Horrible" en anglais) a été publié pour la première fois en France dans Le Parisien pendant 18 ans et ensuite dans Le Journal de Mickey durant 14 ans.
Urban Comics propose enfin le premier volume de l’intégrale de la série qui revient logiquement sur les deux premières années des dailies par Dick BROWNE dans une édition inédite… Nous permettant ainsi de redécouvrir le chef viking Hägar, sa femme Hildegarde qui garde d’une poigne de fer la maison, ses enfants Homlet le chétif et la belle Ingrid qui rêve de suivre son père sur les champs de bataille, et son meilleur ami Eddie qui accompagne et conseille Hägar !

Par fredgri, le 14 janvier 2016

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Notre avis sur HÄGAR DÜNOR #1 – 1973 – 1974

Je lisais Hägar Dünor quand j’étais gamin et je garde un très bon souvenir de ces moments à découvrir semaine après semaine les gags de cette série d’une simplicité désarmante qui nous entraînaient dans les pas de ce chef viking, maître des champs de bataille, qui partait conquérir l’Angleterre, saccager des villages, remplir son drakkar de trophées avant de revenir dans son village ou l’attendait sa femme qui ne se laissait pas impressionner par tout ça, lui tendant à l’occasion un sac de poubelle à sortir ou lui demandant de ne pas oublier les patins à l’entrée !

Amorcée l’année dernière avec la parution de "Comics Strips, une histoire illustrée" la nouvelle collection d’Urban Comics propose de revenir sur quelques grands strips classiques ou modernes. On commence donc avec le célèbre Hägar Dünor (avant d’attaquer un peu plus tard les Cul-de-sac) qui bénéficia d’un retentissant succès avant même de paraître, étant publié (grâce au soutien de King Feature Syndicate) dans 200 journaux à sa sortie, pour atteindre les 1000 cinq ans plus tard ! Ce qui est tout de même exceptionnel !
Les strips font donc un retour en force depuis quelques temps, en France, suivant le mouvement des éditeurs américains qui dépoussièrent actuellement un patrimoine très impressionnant ! On a pu redécouvrir quelques pointures comme Prince Valiant, Tarzan, Flash Gordon (Soleil), Krazy Kat (Les Rêveurs), Mickey (Glénat), Les Peanuts (Dargaud), Nancy (Actes Sud), Terry & the pirates (BDArtistes), Cul-de-sac (Delcourt et bientôt Urban), Barnaby (Actes Sud), Calvin & Hobbes (Hors Collection), Little Nemo (Delcourt, Taschen), Pim Pam Poom (Michel Lafon), Mafalda (Glénat) etc.

Ainsi, après s’être d’abord attaché au catalogue DC nouvellement racheté, Urban a développé des collections plus indépendantes, traduisant des séries moins ancrées dans le mainstream, plus audacieuses. La nouvelle étape est donc de revenir sur cette matière encore assez mal connue constituée par cette incroyable quantité de strips qui ont fait l’histoire de la BD mondiale, influençant les comics, et de nombreux auteurs (à la base les premiers comics étaient des recueils regroupant justement des strips paraissant dans les journaux !) Le projet est ambitieux et on ne peut que souligner la rigueur éditoriale qui sou-tend la démarche d’Urban. Publier en première partie le livre de Jerry Robinson fut une excellente initiative qui a permis de se familiariser avec ce matériaux fascinant ! On attend donc avec impatience les prochains projets…

En attendant, ce premier volume d’Hägar Dünor nous ramène vers les bases de cette série, les relations qui se sont établies entre les divers protagonistes, la dynamique forgée dans une succession de contrastes qui font tout le sel de cette série hilarante, malgré le fait qu’au final on soit souvent dans des répétitions, des gags qui reviennent encore et encore, qui jouent exactement sur la même ficelle au fil des semaines. Toutefois, regarder ce viking bourru qui se fait remettre à sa place par sa femme, qui regrette parfois son mariage, qui tente sempiternellement d’empêcher sa fille de l’accompagner, qui doit se faire à l’évidence que son fils n’est réellement pas fait pour cette vie, c’est immanquable…
La vie de ce chef est pleine de résignation, il est certes un grand chef de guerre, il a à son actif des batailles légendaires, il combat régulièrement des sorciers, des créatures monstrueuses, mais une fois franchie la porte de sa maison il n’est que le mari de sa femme, un père de famille qui doit ramener de quoi mettre dans la marmite et accessoirement tout tenter pour ramener tout ce qu’Hildegarde lui demande sur sa liste de course quand il part saccager des villages !

On le comprend très vite, Browne se moque gentiment de ces sagas nordiques, de ces personnages haut en couleur, fort d’épaules qui allaient ravager à la tête de leurs troupes, les villages qu’ils attaquaient… Mais en contrepartie, il propose aussi une sorte de pendant viking des séries familiales comme celle qu’il dessina longtemps aux côtés de son scénariste Mort Walker "Hi and Lois". Il explore les différents rapports de force au sein de la cellule familiale, l’éducation, les premiers amours, le couple avec l’image de l’homme soumis aux règles de la femme ! Cet adroit mélange fonctionne tout de suite, car Browne use d’un humour minimaliste très efficace. Ici pas de gags sophistiqués, pas de longs discours, quelques très bonnes idées qui se déclinent selon les situations, avec comme background un cadre pseudo historique, mâtiné de personnages légendaires. On situe vaguement l’époque, sans forcément s’y attarder. Après tout il y a de très légers et réguliers anachronismes qui viennent pimenter la lecture, qui en devient alors encore plus savoureuse !
Il faut dire aussi que le graphisme est lui aussi réduit à son strict minimum, se contentant le plus souvent d’un ou deux angles de vue sur les personnages, avec des décors brossés en deux coups de crayon ! Mais tout cela participe aussi à l’efficacité de la série. On ne se perd pas dans les détails, on lit le strip en deux secondes et le gag fait tout de suite mouche !

Di(c)k Brown va assurer les scénarios et les dessins jusqu’en 88, passant le flambeau, avant de mourir, à ses enfants. A ce jour Titans a publié 5 volume qui vont jusqu’en 81… Urban ne compte en publier que 3 au final, pas de raison particulière évoquée, mais qu’importe, car en attendant c’est une très belle occasion de replonger dans cet univers bien déjanté. A noter que ce volume contient un intéressant texte introductif qui revient sur le phénomène que fut la série à travers le monde, ainsi que sur sa genèse ! On trouve aussi à la fin le début d’un article par Tony Lapoussière sur les publications françaises de Hägar Dünor, très instructif !

Un premier et imposant volume que je vous conseille vivement donc !

Par FredGri, le 14 janvier 2016

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