Florida

Au 16ème siècle, ayant fui les persécutions catholiques en France, le protestant Jacques Le Moyne a trouvé refuge à Londres. Vivant avec son épouse Eléonore et ses deux enfants, il œuvre pour le compte de Marie Stuart en réalisant des motifs floraux. En 1572, la visite de Walter Raleigh lui annonçant le terrible massacre de la St Barthélémy et la disparition horrifique de l’amiral Gaspard de Coligny vient chambouler son quotidien et surtout raviver de profondes blessures non cicatrisées. En effet, Jacques Le Moyne a été antérieurement cartographe et participé à une expédition coloniale menée par René de Laudonnière sur le Nouveau Monde et en particulier la Floride. Cette opération s’est vite transformée en un véritable cauchemar duquel Jacques en est revenu totalement meurtri et manifestement incapable à évoquer. Toutefois, c’est à l’issue de nombreuses suppliques de Walter Raleigh, du géographe Richard Hakluyt et de l’insistance de son épouse que Jacques Le Moyne décide enfin de narrer la douloureuse entreprise avortée.

Par phibes, le 22 août 2018

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Notre avis sur Florida

Après Le sourire des marionnettes et La vision de Bacchus, Jean Dytar revient sur les étalages pour un nouveau one-shot historique qui a la belle particularité de se pencher sur un épisode colonial éphémère concernant la tentative huguenote de création de la Floride française au 16ème siècle.

Se focalisant sur le personnage clé qu’est Jacques Le Moyne, cartographe ayant réellement participé à l’expédition colonisatrice gérée par l’Amiral de Coligny, Jean Dytar nous offre un récit historique particulièrement impressionnant de par la très grande richesse documentaire qu’il dévoile et également très envoûtant eu égard à la posture tourmentée et recluse de ce protagoniste qui se doit de s’expliquer sur son état.

D’une portée pleinement humaine et servie par un jeu narratif remarquable, cette équipée a le mérite de s’appuyer sur un jeu intimiste passionnant, à la faveur de tranches de vie et de retours en arrière subtilement bien choisis. La personnalité du cartographe pèse de tout son poids sur le récit et génère une réelle envie de savoir ce qu’il en est, cadré en cela par des repères historiques et par l’intervention de hauts personnages ayant contribué au déroulement de ce désastre colonial. L’intervention d’Eléonore est aussi des plus efficaces puisqu’elle suscite, sous le couvert d’une ferveur aventureuse, cette envie de connaître cette terrible vérité si difficile à étaler.

Cette restitution se veut réellement impressionnante pareillement par la qualité graphique dont Jean Dytar a su peaufiner dans des détails là aussi impressionnants. En effet, d’un geste épuré assurément efficient, l’artiste fait preuve d’un travail léché en couleurs directes, dont les tonalités permettent de bien différencier les époques traitées. S’agissant d’un récit de voyage, il s’est appliqué, surtout lors de l’évocation de l’expédition en Floride, à découper ses planches en appliquant un canevas de traits que l’on peut retrouver sur des cartes.

Un très beau travail historique, méticuleux et passionnant, qui a le mérité d’être postfacé par Frank Lestringant, professeur à Sorbonne Université.

Par Phibes, le 22 août 2018

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