Exil

Ce soir là, en attendant ses petits enfants pour fêter Noel, Fransisco se souvient de la guerre, sous le "règne" de Franco, quand des milliers d’espagnols durent s’exiler sous peine d’être emprisonnés, qu’il dut laisser derrière lui sa femme et ses enfants… Cet exil loin des siens, dans la souleur, à fuir avec ses compagnons d’infortune, humilié, emprisonné, obligé de trouver refuge en France même si les ennuis ne se sont pas arrêtés pour autant…
Fransisco revoit encore cette photo, il la touche lentement en regardant le visages de ces gens, sous la neige, en pleine montagne, dans un long et interminable convoi…

Par fredgri, le 9 juin 2013

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Notre avis sur Exil

Les deux auteurs, d’origine espagnole, nous entraînent dans un récit mémoire très tendu, mais paradoxalement bourré d’une humanité particulièrement touchante.
Car ce qu’il faut retenir, surtout, de cette histoire c’est cette envie de survivre, de passer au travers de cette violence qui se glisse partout, qui brise des vies, sans raison, sans sentiment ! Et Fransisco demeure d’une part le survivant qui témoigne, mais il garde en lui le souvenir de cette Histoire et à travers lui se reflètent tous ces "autres" qui durent s’exiler, loin de Franco et de ses exactions !
On garde encore en mémoire le magnifique diptique "Le Convoi" paru il y a deux mois, et avec Quintos et Espana la Vida on se demande si en ce moment il n’y aurait pas un élan mélancolique vers la Retirada !

Henri Fabuel et Jean-Marie Minguez abordent le récit par le biais de la famille et des destins croisés de plusieurs protagonistes.
C’est parfois un peu confus, surtout qu’on a tendance à ne pas forcément trop les reconnaître, néanmoins cette multiplicité des trajets permet vraiment d’appréhender la complexité et les difficultés qui se sont présentées à tous durant cette fuite et ces retrouvailles. Il y a peut-être une trop grande volonté de tout aborder, de vouloir trop en raconter, quitte à user parfois d’ellipses un peu rudes (on quitte un personnage pour savoir quelques pages plus tard qu’il a été exécuté au détour d’une phrase…) Toutefois, l’émotion est palpable sur chaque page, qu’il s’agisse de la tristesse, de l’amour, la haine, la peur, le dégout etc. Le récit est un incroyable vecteur de sentiments. On suit ainsi des tranches de vie d’une famille pourchassée par les forces fascistes de Franco et plongée dans le drame de la séparation, des privations et de la violence policière.
Henri Fabuel et Jean Marie Minguez se tiennent auprès de leurs personnages pour permettre d’appuyer sur le côté très réaliste de cette fuite continue et de cette peur de se faire prendre à chaque tournant.

Le scénario reste très efficace dans les émotions, n’hésitant pas à forcer par-ci par-là le pathos, mais le sujet l’exige presque tellement c’est intense et profond.
En axant leur propos sur l’authenticité, les auteurs insistent sur l’émotionnel, sur ce côté extrêmement touchant de cette "aventure" de Francisco.

Jean-Marie Minguez travaille toutes ses planches en noir et blanc, maniant avec une très grande virtuosité le lavis afin de jouer sur la lumière et appuyer les expressions de ses personnages. Son encrage rehaussé de lavis gris est plein de douceur et de justesse, malgré le ton général assez sombre. Le seul bémol, comme je le disais plus haut, c’est la trop grande similitude des visages, qu’ils soient homme ou femmes, on a tendance à les confondre et s’y perdre un peu entre tous !

Un bel album, tout de même, très marquant. Un incroyable acte de mémoire, en tout cas !

Par FredGri, le 9 juin 2013

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