Vive la crise ?

Angoulême, du 30 juin au 3 juillet 2008, Université d’été de la bande dessinée. Le colloque rassemble des éditeurs, diffuseurs, journalistes, auteurs, libraires durant quatre jours au cours desquels ils échangent leurs points de vue et dressent l’état des lieux du milieu. Parmi les personnalités intervenantes, citons : Gilles Ciment du CIBDI, Fabrice Piault de Livres Hebdo, Didier Pasamonik journaliste, Grégoire Seguin éditeur Delcourt, Jean-Louis Gauthey éditeur Cornélius, Louis Delas éditeur Casterman, Benoît Peeters auteur et éditeur, Jean-Pierre Mercier du CIBDI, Xavier Guilbert rédacteur en chef du site du9.com, Sergio Honorez éditeur Dupuis et Émile Bravo auteur, Frédéric Salbans diffuseur – Harmonia mundi, Éric Garnier acheteur Virgin Megastores, Vincent Poeydomenge libraire, Jean-Marie Bouissou directeur de recherche à Sciences Po, Stéphane Beaujean journaliste.
 

Par MARIE, le 1 janvier 2001

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Notre avis sur Vive la crise ?

Vive la crise ? Le titre provocateur de ces actes de la troisième Université d’été de la bande dessinée tout juste sortis de presse pour Angoulême cache en réalité une question : y-a-t-il une crise ou non ? Lecture fébrile, on veut tout savoir,. On va tout apprendre ? Et bien non ! Pas de solution, à peine une ébauche de définition de l’état de crise d’ailleurs démentie d’emblée par Patrice Piault, rédacteur en chef de Livre hebdo, exprimant au contraire une satisfaction à constater la bonne santé du secteur de la bande dessinée sans commune mesure au sein même du milieu du livre.

Ont été invités à débattre des éditeurs, des libraires, des auteurs et des diffuseurs. Si chacun y va de sa constatation, on aurait pu espérer qu’ils aboutissent à force d’échanges d’idées et d’argumentaires chiffrés, à une conclusion constructive, c’est à dire à non seulement à une compréhension de la situation mais surtout à des solutions en vue d’améliorer les choses. Au final, d’après le plus grand nombre, la responsabilité la plus grande, si crise il y a, en revient au libraire. Toutefois, à entendre Jean-Louis Gauthey, il se pourrait que les publieurs – éditeurs ayant pour fonction unique de produire, selon sa définition – ne seraient pas étrangers non plus à la crise artistique, la vraie crise. Autre responsable principal de la crise : l’office sauvage pratiqué par les diffuseurs, la surproduction étant une résultante de fortes mises en place. Il n’est pas difficile d’imaginer en terme de linéaire l’espace pris en rayonnage par une nouveauté d’un titre phare dès lors qu’elle est accompagnée par des albums de fonds faisant partie de la même série mais relookés pour l’occasion. Il ne s’agit plus de un mais de trois voire plus de titres de cette fameuse nouveauté, ce qui ne laisse pas beaucoup de place aux créations de jeunes auteurs. En conclusion, tous les acteurs se renvoient la balle. Oui, la crise est bien là et elle ne se résoudra pas en continuant de faire du catalogue pour gagner de l’espace.

Le colloque se tenait en juillet 2008. En janvier 2009, date de sortie de ces actes, de nombreuses librairies ont fermé leurs portes, la chaîne Album annonce la fermeture de ses filiales hors Paris, les diffuseurs en place rechignent à s’occuper de nouveaux catalogues d’éditeurs en raison d’une surcharge de travail pour leurs commerciaux, les auteurs se réunissent de plus en plus en syndicat afin d’essayer de se faire entendre, etc. Dire « Vivre la crise » semble malhonnête. C’est ne considérer que le chiffre d’affaire global d’un secteur de l’économie au niveau national. Si en effet le commerce du 9ème art permet des échanges financiers importants, le « matériel humain » a plus que jamais besoin de retrouver une valorisation, une identité, et une possibilité de créer sainement. La crise est politique et il est urgent qu’un vrai échange d’idées ait lieu. Le constat est presque derrière nous, ce qu’il faut maintenant ce sont des solutions.

L’ouvrage en lui-même est facile à lire, agréablement maquetté mais n’apporte aucun sauvetage pourtant si essentiel. L’idéal serait de se réunir à nouveau sur le même thème qui n’est pas à prendre à la légère. La volonté de créer reste forte, les auteurs ont besoin d’être édités pour pouvoir progresser et les éditeurs qui soutiennent ces démarches devraient avoir un accès facilité à la visibilité grâce à des mesures prises notamment par les syndicats des différents corps de métier volontairement unis face à la crise, acceptant de céder du terrain sans pour autant freiner leur production. Tous les acteurs ont à gagner en autorisant la création indépendante. Le vivier est riche, il est dommage ne pas savoir l’exploiter. Cela dit, comme le dit Jean-louis Gauthey, si la loi Lang est supprimée, nous n’aurons plus qu’à rendre les clés.

Dernier point : le prix de ce livre est de 19,50 € ce qui est évidemment préférable surtout dans l’actuelle situation aux 600 euros de frais d’inscription * pour assister aux débats en direct. Donc, mieux vaut soutenir la chaîne du livre et se procurer l’ouvrage quitte à le considérer un peu léger que d’alimenter par sa présence une université d’été réservée à une élite sociale.

Marie Moinard

* Tarifs :  

Professionnels et particuliers :
– 600 € (déjeuners, dîners et hébergement compris)
– 400 € (déjeuners et dîners compris) 

Auteurs et étudiants :
– 400 € (déjeuners, dîners et hébergement compris)
– 200 € (déjeuners et dîners compris)
 

Par MARIE, le 9 février 2009

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