Et pourtant elles dansent...

 
Il leur faut désormais trouver un autre local, mais c’est pleines de confiance qu’elles abordent ce petit tracas. Car dans le local qui accueillait jusque-là les réunions de l’association "Femmes en Luth", elles sont nombreuses celles qui, un jour, ont jour poussé la porte et ont pu en toute sécurité confié leur histoire personnelle. Leurs parcours sont souvent difficiles et sinueux, leurs secrets lourds, mais entre elles, écoute et solidarité n’ont jamais été de vains mots…
 

Par sylvestre, le 7 mars 2019

Notre avis sur Et pourtant elles dansent…

 
Les plans dans cette bande dessinée sont très serrés. L’oeil y est invariablement très proche des gens qu’on écoute et on ne peut donc qu’imaginer ce qu’il y aurait autour. En élargissant "mentalement" les cadrages, on se retrouverait pourquoi pas dans ce genre de local associatif où on se sent chez soi car on y trouve ce qu’on est venu y chercher mais où dénuement et simplicité trahissant de faibles moyens feraient du lieu un décor pas exactement idéal pour s’épanouir. Des murs sur lesquels seraient placardées quelques affiches de prévention, des chaises de collectivité qui font du bruit quand on doit les empiler pour passer un petit coup de serpillière sur un carrelage froid ou un lino marqué, une machine à café un peu cheap sur une table légèrement bancale, un canapé récupéré feignant le confort…

Cette modestie qu’on (p)ressent est cependant mise entre parenthèses car c’est bien le discours des femmes dont on entend les témoignages qui est mis en valeur. C’est même le coeur du propos. Dans Et pourtant elles dansent, l’auteur Vincent Djinda présente en effet quelques femmes en choisissant de ne reproduire que leurs paroles et leurs expressions. En occultant même les questions qu’il a dû leur poser pour ne nous laisser entendre que leurs réponses.

Congolaise, Albanaise, Kosovare, Centrafricaine, jeune ou moins jeune : la femme qui vient chercher de l’écoute et de l’aide auprès des "Femmes en Luth" vient avec son histoire et avec ses différences mais elle vient aussi avec son triste dénominateur commun, que ce soit la violence, la pauvreté, les problèmes administratifs…

Mais cette BD n’est pas un reportage : elle n’est que rafales d’instantanés, et aucun cas personnel n’est suivi du début à la fin. C’est comme une collection de rushes : tout n’est que bribes, et tout est finalement très statique. C’est un peu déstabilisant car on ne sait pas, au début du livre, combien de temps va durer chaque témoignage ni si la BD ne sera que succession de tels témoignages. (c’est le cas).

L’auteur a côtoyé des membres de l’association valentinoise "Femmes en Luth" pendant une année avant de réaliser cette bande dessinée. S’il a fait ses études dans le domaine du film d’animation, il signe là sa deuxième BD. Son talent graphique n’est malheureusement pas hyper convaincant dans la mesure où il n’offre pas de diversité puisqu’on ne voit que des personnages. En outre, on dirait presque que tous ces visages qui composent les planches sont reproduits à partir de séquences filmées qu’il aurait mises sur "Pause". Le livre étant volumineux et la formule la même tout du long, la lecture en devient un peu lassante. Dommage.

Reste le fond : ces femmes qui ne baissent pas les bras, ces femmes qui se battent. Restent leur solidarité et leurs victoires. Et cet hommage que leur rend Vincent Djinda en leur donnant la parole et en la portant vers nous.
 

Par Sylvestre, le 7 mars 2019

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