Le don de Rachel

Rachel a un don extraordinaire, un don qui lui permet de prédire le futur, de deviner ce qui se cache dans une poche, quelles peuvent être les pensées de celui qui la regarde. Elle fascine, émeut, on se bouscule pour l’inviter à faire le spectacle, jouer le jeu, un bandeau sur les yeux, on ne lui pose des questions en souriant, on sait qu’elle aura toutes les réponses… Mais au fond, personne ne la voit elle, personne ne veut en savoir plus sur ce qu’elle est profondément… Un soir, usée, elle disparait définitivement… Près de 130 ans plus tard, Liv met en scène un ambitieux opéra adaptant le mystérieux livre "Le Don de Rachel". Elle est fasciné par son sujet, elle a peur de ne pas être à la hauteur, et pourtant, le résultat est excellent… 40 ans plus tard, une photographe garde un daguerréotype représentant Rachel dont le regard lui a inspiré son propre travail. Elle découvre que Liv, qui a maintenant 80 ans, est en ville, elle réussit à la rencontrer…

Par fredgri, le 26 mai 2021

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Notre avis sur Le don de Rachel

Il y a certains albums dont on n’attend rien de particulier, juste un regard sur une couverture, des petits échos flatteurs, mais c’est tout. On se laisse alors surprendre au détour d’une page, par une ambiance, une idée séduisante, un charme presque éthéré qui nous pousse à plonger toujours plus loin, sans lâcher prise. On est happé pour de bon… On ne s’y attendait donc pas, en effet !

Le Don de Rachel est de ces découvertes qui surprennent par leur apparente simplicité. Cette justesse dans l’écriture et le dessin, cette façon de ne pas trop en faire, de nous emporter dans un récit, dans les traces d’une jeune femme mystérieuse qui nous envoute dès que l’on croise son regard.

Il n’est pas réellement question de son don qui s’expose au gré des rendez-vous mondains, d’où vient-il ? En quoi consiste-t il vraiment ? On ne le saura pas, car ce qui est important c’est l’essence même de cette héroïne qui doit accepter de s’effacer progressivement devant le phénomène de foire qu’elle est devenue petit à petit et dont tous s’arrachent la possibilité d’être transpercés de part en part par ses visions. On est touché par la détresse derrière le masque, ce sourire d’opérette qui se forge au fil des représentations. Alors qu’elle veut juste partager, transmettre, Rachel finit par s’étioler doucement et finalement par disparaître. Devenant ainsi un doux spectre qui va continuer sa course dans le reflet d’une photo, d’un livre étrange, oublié dans la boutique d’un vieil antiquaire.

Anne-Caroline Pandolfo nous livre ici un portrait extrêmement émouvant, tout en finesse, qui nous emporte dès les premières pages. Le scénario n’entre pas dans les détails, on glisse dans des atmosphères assez nonchalantes, on sent bien que Rachel n’y est pas vraiment à sa place, on se demande même vers ou elle veut aller en continuant cette mascarade.
Puis, soudain, deux ellipse temporelles. Tout d’abord, il y a Liv est sa mise en scène, puis Virginia qui organise une expo avec ses photographies, qui apprend que Liv est en ville, qui veut la rencontrer. Les histoires se croisent, se nourrissent les unes des autres, se complètent. Et si, jadis, Rachel a disparu c’est peut-être pour revivre dans ces regards de femmes artistes !

De son côté, Terkel Risbjerg nous offre une magnifique prestation, très inspirée (j’adore plus particulièrement la scène onirique avec Rachel qui quitte son corps !!!). Il accompagne l’histoire, la transcende complètement pour nous bouleverser avec ce visage qui reste en mémoire tout du long !

Le Don de Rachel ne laisse pas indifférent. Un album qui n’a pas fini de faire parler de lui !

Vivement conseillé !

Par FredGri, le 26 mai 2021

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