Dieu en personne

Lors d’un recensement, dans une société kafkaïenne, alors que s’allonge une file d’attente morne et silencieuse, un personnage se présente devant les fonctionnaires. Sans papiers, sans preuves d’existence civile, il déclare s’appeler Dieu, prénom Dieu. "Dieu Dieu. Mais en général on m’appelle Dieu tout court".
Et si Dieu venait sur terre, quelle serait la réaction des hommes, des croyants, des athées, des agnostiques ?

Par olivier, le 19 septembre 2009

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2 avis sur Dieu en personne

Quelle serait la réaction de la société civile face à un tel événement : Dieu s’est incarné sur terre.
L’enthousiasme, la peur, l’angoisse devant des certitudes mises à bas, l’incrédulité et le refus. Et si réellement Dieu est Dieu, est-il responsable des malheurs, collectifs ou individuels, des hommes? Peut-on faire un procès à Dieu ?
Mais la question du divin n’est ici qu’un prétexte pour Marc Antoine Mathieu, prétexte fort bien utilisé puisqu’au premier abord, on pourrait croire que l’album est une ouverture à la réflexion sur l’existence ou non de Dieu. Il oppose joyeusement divers courants de pensées philosophiques. Il fait disserter ses personnages qui énoncent sentencieusement des vérités absconses. Riche et ouvert, le discours sur l’existence de Dieu, fil rouge de l’album, est solide et documenté. Nul doute que des élèves de Terminale pourraient y trouver matière à nourrir une dissertation substantielle.
Mais cet album est aussi et peut- être surtout une réflexion sur notre société de consommation. Nous vivons à une époque où tout est manipulation, où même les informations peuvent être truquées par des mises en scène au demeurant fort peu subtiles. Les modes, les événements, les "people" sont entièrement créés pour générer de l’argent et le marketing autour de Dieu incarné représenterait des sommes fabuleuses dont chacun souhaiterait sa part.
Nous vivons dans une collectivité entièrement soumise à l’image. Plus de naturel, toute personnalité publique a son conseiller en communication, aucun nouveau produit ne sort sans une étude de marché préalable et sans avoir sa cible bien définie. Marc Antoine Mathieu égratigne donc tout ce joli petit monde qui ne pense que vente et profit et pour qui Dieu est avant tout un produit.
De part sa construction éclatée, le récit, qui aurait pu être pesant, apporte des respirations au lecteur.
Les changements de perspective sur la venue de Dieu et ses conséquences aussi bien spirituelles que matérielles, apportés par ces courts regards, non seulement offrent un maximum d’éclairage sur les différentes perceptions que peuvent avoir les individus en fonction de leur origine sociale et culturelle, faisant de cette venue un événement universel, mais surtout ne lassent pas le lecteur qui aurait tôt fait de décrocher si le récit n’était que philosophie et controverse.
Ping pong de phrases qui rebondissent, se percutent et se régénèrent dans la discussion, Marc-Antoine Mathieu manie lui aussi très bien le verbe.

Sous un aspect très sérieux, philosophique, se cache un esprit potache, un second degré assez jouissif. Le récit est truffé de traits d’humour aussi bien dans les situations que dans les dialogues ou monologues. Jeux de mots subtils (ou pas) qui me ravissent et vous raviront pour peu que vous y soyez attentifs. Un album à lire au premier ou au deuxième degré, mais n’en doutez pas, il vous est recommandé par Dieu en personne.

Par Olivier, le 19 septembre 2009

Avec Dieu en personne, Marc-Antoine Mathieu se lance dans une œuvre complexe, qui a dû réclamer un travail impressionnant. L’auteur, en effet, a joué des genres pour produire un récit très philosophique, mais aussi truffé de clins d’œil et d’humour au second degré.

Il nous parle ainsi de toutes ces questions qui se posent sur l’existence de Dieu, n’hésitant pas à le bousculer, par exemple au tribunal, lorsqu’on lui demande pourquoi il n’intervient pas plus pour faire de la Terre un monde meilleur. Ainsi, derrière un récit improbable, l’auteur pose beaucoup de questions et nous entraine sur un terrain plein de surprises.

La critique de notre société de consommation et d’information est également un des socles du livre, mettant une fois de plus le doute sur le monde qui nous entoure.

Néanmoins, si l’on ne peut nier l’intelligence du travail de Mathieu, ce livre ne plaira pas à tous les publics. Son graphisme noir et blanc donne une ambiance assez pesante, même s’il faut avouer qu’elle favorise la réflexion et met en valeur les textes.

Quant au récit lui même, il est justement noyé dans ces questions philosophiques. Certes, l’humour est très présent, mais il finit par perdre de son éclat en raison d’un ton assez monotone. Je n’ai cessé d’être étonné par l’imagination de l’auteur et sa capacité à poser sans cesse de bonnes questions. Pourtant, je dois avouer que j’ai eu du mal à arriver au bout de l’ouvrage. Intelligent, oui, mais finalement un brin ennuyeux.

Par Legoffe, le 3 octobre 2009

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