Les Crocodiles

Bruit de bouche, tripotage dans le bus, exhibition, agression sexuelle du conjoint, invectives verbales… le harcèlement des femmes peut recouvrir de multiples formes, que ce soit au travail, dans la rue ou dans le cercle intime. Dans Les Crocodiles, les hommes agissent en véritables reptiles et agressent les femmes qu’ils abordent. Derrière leur peau verte et leur grande gueule, leur comportement éclate au grand jour.

Les témoignages quelquefois amusants, le plus souvent oppressants et malsains recueillis par Thomas Mathieu sont explicites : ils montrent que le harcèlement de rue est un problème de société. En fin d’ouvrage, l’auteur donne conseils et astuces pour s’en extraire, et des spécialistes s’expriment sur le sujet.

Par geoffrey, le 28 novembre 2014

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Notre avis sur Les Crocodiles

Touché par le court-métrage, femmes de la rue (2012), de la belge Sofia Peeters, le bédéiste bruxellois Thomas Mathieu décide de rapporter sur son blog des histoires vraies. A sa demande, des lectrices lui racontent témoignages et expériences de l’agression vécue au quotidien par les femmes.

Il parvient à transformer cette matière en histoires dessinées, où les hommes, qu’ils soient seul ou en groupe, apparaissent sous les traits de crocodiles (ou de simples lézards pour les plus inoffensifs). Leur peau verte et rugueuse repousse le lecteur et oblige ce dernier à s’identifier avec les personnages féminins. L’agissement des reptiles devient soudain lourd, malhabile, agressif, voire plus encore. Leur comportement heurte, révolte, scandalise.

Avec un dessin rond, sans case, aux décors minimalistes, Thomas Mathieu parvient à faire ressentir la pesanteur lié à ce phénomène récurrent de la violence ordinaire faite aux femmes. Et tout au long des 176 pages, le jeu de couleurs tout en bichromie, gris et vert, renforce la sensation d’étouffement.

L’auteur relate aussi quelques anecdotes plus légères qui viennent tempérer les propos, éclairent d’autres facettes des crocodiles ou qui donnent à écouter les remarques acerbes posées par d’autres femmes. Ce recul salutaire évite de tomber dans les travers de la guerre des sexes.

Plus qu’une bande dessinée et plus qu’un reportage, ce livre ne se cantonne pas de rapporter le pathétique des crocodiles et la révolte ou le traumatisme de leurs victimes. Il donne aussi, comme dans un manuel de survie, des conseils, quoi dire, quoi faire, comment réagir – même en tant que témoin – face à cette violence ordinaire. Le bédéiste a en effet mis en image les travaux de plusieurs spécialistes conviées à s’exprimer par ailleurs. Toutes ces raisons confirment l’excellente idée d’avoir transformé ce blog en ouvrage papier.

Par Geoffrey, le 28 novembre 2014

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