Crépuscule des pères

Au début de l’année 2016, Thomas Cessac a rendez-vous avec son avocat pour la préparation du face-à-face qu’il doit avoir avec son ex-femme au tribunal pour l’obtention de la garde alternée de sa fille Lise. Malgré les digressions audacieuses de l’avocat adverse, le père éploré a peut-être une chance d’avoir gain de cause. En attendant l’audience, Thomas invite sa compagne à faire un tour en ville. C’est dans une librairie qu’il tombe incidemment sur un très ancien hebdomadaire qui relate une tragédie familiale qui s’est déroulée en 1969 à quelques kilomètres de là, à Cestas. Intrigué par cette affaire dont l’origine semble avoir des points communs avec ce qu’il traverse, il décide de la découvrir. Très vite, les informations qu’il glane finissent par le hanter au point qu’il s’engage dans des recherches beaucoup plus poussées pour en dégager les véritables causes d’un tel drame.

Par phibes, le 25 août 2021

Notre avis sur Crépuscule des pères

Véritable touche à tout dans les domaines des 5ème et 7ème art, Renaud Cojo fait une incursion dans l’univers de la bande dessinée en nous proposant un roman graphique ayant trait à un sujet sociétal qui reste très actuel, celui concernant la séparation et la garde des enfants. Afin d’illustrer sa thématique sensible, le scénariste s’est associé l’ancienne lauréate du prix Alph-Art jeunesse d’Angoulême de 2001, Sandrine Revel.

Pour étayer son propos et démontrer qu’une séparation avec des enfants au milieu peut avoir des répercussions graves, Renaud Cojo a pris pour parti d’unir la crise traversée en 2016 par un homme, Thomas Cessac, à un fait tragique ayant défrayé la chronique en 1969. C’est dans une sorte de chassé-croisé temporel que le lecteur se doit de plonger, un alternat entre deux histoires subtilement entretenu par les recherches entreprises par le fameux Thomas, poussé à mieux comprendre les causes du terrible drame.

A n’en pas douter, le récit auquel nous assistons est pour le moins sérieux et si l’on connaît l’affaire du « forcené de Cestas », très médiatisée à son époque, a toute les chances d’accentuer sa gravité. Il n’empêche que celui-ci reste pour le moins enveloppant (de par sa dimension humaine qui prend aux tripes) et pointe du doigt durement les errements judiciaires qui pourraient exister sur la privation des droits du père sur ses enfants. L’effort documentaire est indéniable, rigoureux (le scénariste fait appel à des personnages ayant réellement existé) et tend à prouver que celui-ci a souhaité donner par ce biais une portée paroxysmique à son sujet en le liant à la tragédie perpétrée par André Fourquet et en le traitant jusqu’au bout (voir en fin d’album l’épilogue et ce qui suit).

Graphiquement, on restera subjugué par le remarquable travail de Sandrine Revel. En effet, cette dernière trouve le moyen de bien distinguer picturalement les époques, leur donnant à chacune des ambiances différentes. Usant volontairement d’un trait plus épuré et d’une tonalité monochrome pour la tragédie de Cestas, elle se révèle dans la représentation plus réaliste du quotidien de Thomas. Cette association de styles fonctionne superbement et donne beaucoup d’attrait à cet ensemble.

Une histoire imbriquée sur deux temps très réussie dont la thématique soulève avec force et douleur la dureté de la séparation.

Par Phibes, le 25 août 2021

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