Corduroy

 Ryusei Kogure est un jeune Japonais de 22 ans ; il a quité le Japon pour suivre un homme en France, mais là, il a été chassé car celui-ci était marié… 
 En errance à Paris, il vit au jour le jour et croise le destin de plusieurs hommes et femmes (plus ou moins un/une par chapitre) de la communauté japonaise à Paris ; ceux-ci l’aident un peu ou l’écoutent ou couchent avec lui.

Par François Boudet, le 5 février 2011

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Notre avis sur Corduroy

 Après "A l’ouest de Tokyo" et "Beautiful world" parus en 2004 chez Carabas, "Corduroy" est le troisième titre de Yamada Naito publié en français ; cette fois ci chez Kana. Le format est plus grand que les 2 précédents ; ce qui nous donne un beau livre (bien que les scans soient moins réussis par contre).

 Née en 1965, Yamada Naito débute sa carrière en 1987 alors qu’elle est encore étudiante. Pendant une dizaine d’années, elle publie des mangas classiques, tout public, puis à partir de 1996 son oeuvre évolue vers une manga plus alternative, utilisant l’outil informatique (intégration de photos, flous artistiques, etc.) et s’adressant à un public plus adulte. Un an plus tard, elle part avec son chat s’installer à Paris en continuant de publier ses histoires au Japon… 
 L’influence parisienne ne se fait pas ressentir uniquement au travers des décors et de son sens de l’observation des personnes autour d’elle, mais également au travers du cinéma français (Leos Carax, Bertrand Blier) et de la Bande Dessinée ; "J’ai toujours pensé que raconter une histoire en manga était comme réaliser un film et qu’on devait se calquer sur le même rythme. De fait, cette manière de créer un album (de bande dessinée) m’a beaucoup séduite et j’ai pensé que c’était exactement ce que je voulais faire depuis longtemps"…

 S’il y a une influence française, il ne faut pas oublier qu’il s’agit bien d’une manga japonaise, et comme dans beaucoup de bandes dessinées du Pays du soleil levant, l’accent est mis sur l’histoire. Ainsi, le dessin, même s’il a son importance évidente et sa beauté propre, n’est pas autant sacralisé et poussé que chez nous généralement et sert essentiellement à la narration de l’histoire. Le style de Yamada Naito n’est ni très esthétique, ni très simple, ni très grand public. Pourtant, il reste très lisible et efficace. Le dessin est sobre mais l’on sent les personnages bien posés (ceux-ci d’ailleurs, de façon réaliste, se changent, prennent des bains, etc…). L’histoire de ce garçon un peu perdu, épris de liberté mais à la limite de la prostitution pour survivre, amoureux et "sans coeur" à la fois, est assez touchante à mon sens, mine de rien. Son identité, son caractère, son parcours, tout comme ceux des personnages secondaires qu’il croise, sont assez creusés et intéressants… Les cadres noirs dessinés autour des cases (ne laissant plus l’espace blanc traditionnel entre les cases) renforcent l’idée de "cinéma", aidée en ce sens par la mise en scène. 

 La première fois que j’ai entendu parler de Yamada Naito, c’était par l’intermédiaire de Frédéric Boilet en 1998 qui, installé au Japon, admirait l’oeuvre de cette auteure. J’ai eu ensuite l’occasion de "lire" plusieurs de ses ouvrages en japonais. Je me réjouis donc de la voir enfin traduite en français !

 "Corduroy" a une trame plus simple, plus accessible, que ses deux mangas précédemment publiées en français. Une bonne occasion peut-être d’essayer de découvrir cette mangaka si vous ne l’avez pas encore fait…

Par François Boudet, le 17 mars 2006

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