Comme en quatorze

Au tout début de la guerre de 14, le fort de Chaudfontaine qui protège avec d’autres Liège vient d’être anéanti. Coupé du monde, le fort d’Embourg, situé à proximité, est désormais menacé. Aussi, le commandement général basé à Liège doit être prévenu de l’avancée meurtrière des allemands. Le Commandant en second du fortin Richard Warister de Longlois désigne deux hommes, les frères Dejardin, Edmond et Henri, pour cette dangereuse mission. Deux ans plus tard, en décembre 1916, Madeleine Dejardin et sa fille Julie contactent Jules Hentjens afin de lui faire connaître la sinistre vérité sur la mort de ses deux fils provoquée délibérément par leur supérieur, patron d’usine, pour se venger de leur statut d’ouvriers contestataires. Devant l’hypocrisie qui a entouré ce sinistre évènement, Firmin, le frère cadet des deux disparus, s’est mis en tête de se faire justice en tentant de retrouver l’officier supérieur Warister. Parti subrepticement en Hollande, il laisse dans l’affliction Madeleine et Julie. Grâce à Jules Hentjens, les deux femmes se lancent sur ses traces sans savoir que leurs destinées vont être à tout jamais marquées.

Par phibes, le 5 septembre 2014

Notre avis sur Comme en quatorze

Alors que l’on célèbre unanimement le centenaire de la guerre de 14-18, les éditions Des ronds dans l’O n’échappent pas à cet élan commémoratif en publiant une histoire concoctée par deux artistes pour le moins inspirés par la grande Histoire.

Comme en quatorze se veut un récit qui mêle harmonieusement fiction et faits historiques. Philippe Brau a décidé de prendre comme fil conducteur la quête de deux femmes belges (Madeleine et sa fille Julie) qui se doivent de partir à la recherche de Firmin, respectivement fils et frère de ces dernières. En effet, celui-ci a fui le domicile familial afin d’assouvir son désir de vengeance à l’encontre d’un militaire de haut rang responsable de la mort de ses grands frères.

Après une ouverture en deux temps, le scénariste plonge dans le vif du sujet en se faisant fort d’évoquer, sous l’occupation allemande, des initiatives de personnages communs, initiatives ô combien courageuses et convaincantes par le fait qu’elles se rattachent à des individus et des faits authentiques (par exemple la fuite des remorqueurs L’Anna et l’Atlas V avec Jules Henjens et Joseph Zilliox) et qu’elles présupposent une intrigue aux accents pléniers de lutte de classe conformes à l’époque.

Il en ressort des péripéties humainement et socialement probantes qui suscitent sans équivoque une bonne dose d’émotions. La quête éplorée de Madeleine et Julie bénéficie d’un déroulement linéaire des plus intéressants. Elle permet peu à peu d’entrevoir la personnalité des protagonistes clés comme Richard Warister de Longlois et Armand Dejardin et donne l’occasion d’assister ainsi à quelques bons rebondissements. Il ne fait aucun doute que le mystère qui entoure la mort des frères Dejardin ainsi que la disparition de Firmin et sa soif de justice seront explicités et ce, avec un certain brio.

Georges Van Linthout se complait dans cet univers pictural monochrome qui mêle crayonné appuyé et lavis gris et qu’il use dans de nombreux albums (Mojo, Celui qui n’existait pas, Braquages et bras cassés…). Dans cet opus, son dessin prend plus particulièrement tout son sens pour camper les ambiances dramatiques de la guerre et génère par ce fait des émotions on ne peut plus évidentes. D’un geste éprouvé et surtout réaliste, l’artiste trouve donc la juste expression qu’il sied à cette histoire pour la rendre aussi sensible et agréable à lire.

Une bien belle histoire aux accents intimistes qui allie avec brio réalité historique et fiction, contée par des artistes épris de leur sujet.

Par Phibes, le 5 septembre 2014

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