COEUR EN ISLANDE (LE)
Tome 1

Comme chaque année, une agitation familière ébranle les quais du port de Dunkerque. En ce 2 février 1890, plusieurs goélettes se préparent à prendre la mer pour une campagne de pèche à la morue en Islande de plus de 6 mois. Moïse fait partie de ceux dont un membre de la famille part en expédition et vient lui faire un ultime au revoir. En marge de ces évènements, Moïse dit "le petit miracle" a aussi ses secrets. Trouvé abandonné tout bébé dans une barque, il va apprendre que trois hommes aux caractères bien différents mais ayant aimé la même femme (sa mère) peuvent revendiquer la paternité.

Par phibes, le 1 janvier 2001

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Notre avis sur COEUR EN ISLANDE (LE) #1 – Tome 1

Superbe ouvrage que celui-ci qui ouvre la première partie d’un diptyque sur la vie pénible des pécheurs à la morue dunkerquois du XIXème. Makyo puise dans son passé et plus particulièrement dans celui de son grand-père, pour trouver la matière première qui alimente son témoignage poignant d’une époque révolue. Il dépeint avec pertinence, au travers de la fiction du petit Moïse, le climat d’incertitude dans lequel les femmes de ces "bagnards des mers" étaient plongées lorsque ces derniers partaient en campagne. De même, il nous fait toucher du doigt la terrible épreuve que devaient affronter ces familles lorsqu’un des leurs était porté manquant.

C’est aussi l’histoire d’un petit garçon de 12 ans qui partage avec tant d’autres les vicissitudes de cette vie faite de rudesse mais aussi d’actions solidaires. Le petit plus qui caractérise Moïse est le grand blanc qui accompagne ses origines. En effet, ce n’est qu’au fil des vignettes que l’on apprend que Clarisse n’est pas sa véritable mère et que 3 hommes (dont Ernest, le capitaine de l’Islandaise), se disputent la paternité de cet enfant. Astucieusement, Makyo a su, pour mieux appréhender le climat social de cet épisode dramatique, choisir des personnages de souches différentes pour éviter d’en faire une simple querelle entre marins. Ainsi, l’on rencontrera un poète, un armateur et un capitaine de navire.

Curieusement, l’Islande, qui est le but de ces expéditions, apparaît comme une terre mythique à l’image d’un paradis terrestre et également un lieu de perdition et de désespoir. Makyo joue habilement de ce contraste et nous le fait ressentir au travers des joies et des peines exprimées. A ce titre, "le cœur en Islande" prend toute sa dimension évocatrice. Considérée comme une expression, elle peut signifier le vague à l’âme des familles qui espère un retour et également, par toutes les histoires contées par les marins, une sorte de légende.

Ne souhaitant pas qu’un autre dessinateur s’accapare cette chronique personnelle, Makyo a pris la résolution de tenir lui-même le crayon. Aidé par René Follet, il réalise des graphiques au style des plus agréables, se mariant parfaitement avec l’atmosphère que son récit éveille. La douceur des visages tranchent idéalement avec les conditions inhumaines de ces chasseurs de morues. Les décors sont très représentatifs de la ville de Dunkerque du XIXème. De même, la colorisation est judicieusement privée de lumière vive (on ne voit jamais le soleil) mis à part le tableau représentant la vision onirique de l’Islande. Elle est le reflet d’une ambiance pesante, pleine de tension et d’inquiétude.

"Le cœur en Islande" est un très bel hommage tout en sensibilité aux hommes de la mer dont les évènements contés feront chavirer bien des cœurs.

Par Phibes, le 27 avril 2008

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