CHIISAKOBÉ
Le serment de Shigeji

A seulement 26 ans, Shigeji doit affronter une terrible épreuve. Alors qu’il est en déplacement pour suivre un chantier à Kamakura, il apprend que l’entreprise familiale a brûlé dans un incendie qui a également détruit de nombreuses maisons de son quartier, à Tokyo. Ses parents sont morts dans les flammes.

Seul héritier de la famille, il doit donc tenter de sauver l’entreprise tout en faisant son deuil. Il est aidé, à la maison, par la jeune Ritsu, 20 ans, qui a été embauchée au pied levé comme fille au pair pour assurer les tâches ménagères et les repas car Shigeji loge aussi ses stagiaires. Mais la jeune femme a décidé d’installer dans la maison cinq enfants issus d’un orphelinat voisin, qui a également brûlé, et dont elle s’occupait jusque-là.

Shigeji n’est pas d’accord, mais Ritsu refuse de les renvoyer. Il espère que la visite des services sociaux réglera le problème.

Par legoffe, le 27 février 2017

Notre avis sur CHIISAKOBÉ #1 – Le serment de Shigeji

Ce très beau manga est l’adaptation d’un roman historique de Shûgorô Yamamoto, écrit en 1957. L’histoire avait alors pour cadre l’époque d’Edo. Le mangaka Minetarô Mochizuki, lui, a préféré transposer le récit dans la société actuelle. Il n’en a pas moins conservé les messages d’origine, sur les valeurs humaines et le fait que la volonté peut permettre de relever tous les défis.

Il met ainsi en scène un jeune homme dont les apparences le rendent un peu à part. Il porte une barbe hirsute qui empêche de voir son visage et il est avare de paroles. Autant dire que les gens qui le connaissent, à commencer par ses employés, ne donnent pas cher de sa capacité à sauver l’entreprise de charpente dont il a dû prendre la tête prématurément.

Quant à Ritsu, c’est une sacrée travailleuse, mais aussi une jeune femme dotée d’un fort caractère. Elle est généreuse, mais ne supporte pas l’injustice. Elle va bousculer Shigeji dans son quotidien et l’amener à exprimer lui aussi l’humanité profonde qu’il a en lui.

Derrière eux, l’auteur nous offre toute une galerie de personnages aux caractères très différents. Il y a la belle Yûko et, bien sûr, les orphelins, qui ont des personnalités souvent détonnantes, celle d’enfants qui n’ont pas eu l’amour de leurs parents.

Le livre ne raconte pas des aventures extraordinaires, mais le quotidien de cette « famille » qui s’est construite sur les cendres du passé. La maison apparait comme un refuge pour chacun d’eux, mais chacun est aussi une bouée de sauvetage pour tous les autres face aux problèmes de la vie.

Il en résulte une bande dessinée d’une grande humanité, qui montre ce qu’il peut y avoir de plus beau chez les gens, notamment leur générosité et l’envie de bien faire. C’est une lecture salvatrice, positive.

L’auteur a aussi glisser un peu d’humour dans le manga. Il joue, pour cela, sur certaines scènes, mais aussi sur quelques personnages un brin déjantés. C’est valable pour certains enfants, mais également pour le banquier, dont l’esprit pervers génère des moments cocasses, à prendre au second degré bien sûr.

Il découle de ce mélange de protagonistes une atmosphère singulière d’autant que l’on est moins dans le « dit » que dans le ressenti. Cela se voit jusque dans les dessins, très raffinés. L’auteur a beaucoup travaillé l’expression de ses personnages pour qu’ils portent un message ou un sentiment sans pour autant avoir à s’exprimer. On admire aussi la beauté simple et sensuelle des deux principales héroïnes, Ritsu et Yûko, dont Mochizuki a fait de belles personnes au sens propre comme au sens figuré.

On ressort donc de cette lecture avec un sentiment étrange, déroutant, du fait de cette ambiance si particulière. Mais la magie opère indéniablement et nous nous attachons très vite à ces femmes et ses hommes, nous donnant immédiatement envie de découvrir la suite de leur destinée. Un très beau seinen, valorisé par la qualité d’édition et son format (type roman), qui a bien mérité le Prix de la Série 2017 au festival de la BD d’Angoulême pour son quatrième et dernier tome.

Par Legoffe, le 27 février 2017

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