Le château de mon père

Le palais du roi-Soleil se retrouve quelque peu délaissé par la IIIème République. C’est sans compter sur l’arrivée de Pierre de Nolhac, en 1887, qui va redonner vie au château de Versailles. Son œuvre va se confondre avec l’histoire de sa famille, ainsi qu’avec la « grande » histoire !

Par v-degache, le 4 janvier 2021

Notre avis sur Le château de mon père

Le titre fait bien sûr immédiatement penser à l’œuvre autobiographique de Marcel Pagnol. Si le récit de cette BD se situe à la même période que le roman éponyme, l’atmosphère est bien différente !

Pendant plus de 150 pages, Le château de mon père nous plonge dans le travail de l’Auvergnat Pierre de Nolhac, restaurateur du château de Versailles de 1896 à 1919. Son œuvre patrimoniale se croise avec les joies et déboires familiaux, ainsi qu’avec l’histoire de la nation française.
L’entreprise est osée, d’autant plus que le dessinateur Alexis Vitrebert, dont c’est la première BD, fait le choix exigeant du lavis à la gouache, en noir et blanc ! Et pourtant on se laisse emporter par les vicissitudes du château et les aventures des de Nolhac.
Bien que s’inspirant de l’ouvrage de Pierre de Nolhac, La Résurrection de Versailles : souvenirs d’un conservateur, 1887-1920, Paris, Plon, 1937 (réédité en 2002), les auteurs ont choisi de faire raconter cette passionnante histoire par son fils, Henri. Un gros travail de recherches et d’enquête a également été fait pour la partie familiale.

Ce livre rend bellement hommage au travail de P. de Nolhac. En effet, si Louis-Philippe avait utilisé Versailles pour construire le roman national français, si le 2nd Empire en avait fait un lieu de représentation et de pouvoir, si la IIIème République y réunit le Parlement en Congrès, il faudra l’arrivée du natif d’Ambert pour que le château soit remis en avant, et retrouve l’atmosphère d’un palais « habité » !

L’écriture (le scénario est signé par Jean-Baptiste Veber et Maïté Labat) parvient à rythmer le récit, instillant un savant mélange entre les différents enjeux de celui-ci. On se complait à parcourir aussi bien les intrigues familiales que les difficultés de Pierre à trouver des crédits, ou bien encore l’histoire avec un grand H avec par exemple la signature du Traité de Versailles en 1919 qui entérine la revanche française sur l’humiliation de 1871, lorsque Guillaume 1er se fit proclamer 1er empereur allemand dans la Galerie des Glaces !

Le trait de Vitrebert, et la technique du lavis participent grandement au succès de la BD, lui conférant une atmosphère teintée de nostalgie et de fin de siècle, tout en produisant un dessin toujours en mouvement, même dans les scènes de palabres. Le soin porté par l’éditeur La boîte à bulles à la réalisation du livre ne gâche rien : un superbe dos toilé noir incrusté de lettres blanches, ainsi qu’un intéressant dossier historique et graphique, viennent parachever l’ensemble !

Il faut se précipiter sur Le château de mon père car c’est, devant nos yeux, et sous les pinceaux d’Alexis Vitrebert, un haut-lieut culturel et patrimonial, une vitrine du prestige de la France qui prend forme, grâce à l’action de Pierre de Nolhac !

Par V. DEGACHE, le 4 janvier 2021

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