Chagrin dans le ciel

 
C’était dans les années 1960, en Corée du Sud… Très jeune, Youn-bok a vu partir sa mère. Elle ne supportait plus son mari. Au point de le laisser avec leurs 4 enfants et de ne plus donner de nouvelles.

Youn-bok, parce que son père au chômage ne pouvait plus subvenir aux besoins de la famille, a pris sur lui pour rapporter à manger à la maison. Qu’il fasse froid, chaud, ou qu’il pleuve, il a commencé par vendre des chewing-gums, puis il a ciré des chaussures, gardé des troupeaux, rempli des paniers d’herbe… Les quelques wons qu’il gagnait ne permettaient jamais de manger assez, mais ses nombreux frères et sœurs ne pouvaient que lui être reconnaissants de se décarcasser pour eux, de mettre son éducation scolaire entre parenthèses ou encore de subir les humiliations de clans ou de clients méchants.

Sa maîtresse et ses camarades ont compris la situation dramatique dans laquelle le jeune garçon se trouvait depuis l’âge de 6 ans. Ils ont pris pitié de Youn-bok, lui apportant parfois un peu à manger, quelques habits ou du matériel scolaire ; Youn-bok qui à côté de tout cela tenait à jour un journal intime…
 

Par sylvestre, le 1 janvier 2001

Publicité

Notre avis sur Chagrin dans le ciel

 
Chagrin dans le ciel
est l’adaptation du journal intime de Youn-bok, un garçon qui a réellement existé. Parue à la fin des années 1960 par épisodes dans un journal de Corée du Sud, cette biographie avait touché de très nombreuses personnes. Un film en avait été tiré, même, qui avait connu également un vif succès. Hee-jae Lee, auteur de manhwas, avait lui-même à l’époque été ému par l’histoire de ce petit débrouillard au point d’en faire un ami dans son cœur. Et au point de s’être promis qu’un jour, il allait traduire en images ce Chagrin dans le ciel

Après une présentation des personnages, l’histoire se met en place. Mais son rythme est assez ennuyeux dans la mesure où les événements s’enchaînent mais se ressemblent énormément. Ce qui n’est finalement pas si étonnant que cela : on comprend bien que la qualité de narration d’un gamin dont le principal soucis est de se nourrir ne peut pas être celle d’un poète érudit ! Et c’est pour cela que quand je qualifie d’ennuyeux le rythme du récit, il faut bien mettre cela dans son contexte et comprendre que c’est surtout sur le héros que cet ennui, que ces tracas quotidiens, ont pesé…

Si vous aviez vu ce reportage TV en caméra cachée d’il y a quelques années montrant de pauvres enfants affamés de Corée du Nord réduits à mendier et à rechercher jusque dans les boues les plus insalubres quelques miettes à picorer, vous aurez fait le parallèle avec l’histoire de Youn-bok ; bien que toutes proportions soient gardées : certes Youn-bok vivait dans la Corée du Sud de l’après-guerre, mais l’exemple du reportage TV ci-dessus fait référence à la dictature actuelle du maître de Pyong-Yang…

Parler de cette boue dans laquelle les enfants devaient chercher le salut de leur estomac m’offre une transition pour évoquer les couleurs utilisées pour le manhwa Chagrin dans le ciel. A l’image du récit, elles sont tristes, sales, boueuses. Mais là encore, on ne peut qu’applaudir cette vision des choses qui fait ressortir la gravité de la situation de Youn-bok. Les enfants, les personnages, dessinés de manière assez rapide, arrondie, approximative, tranchent pourtant avec le sinistre des décors et des situations. On doit pouvoir y voir le message comme quoi l’âme humaine est intérieurement heureusement plus joyeuse que le triste quotidien des pauvres…

La lecture de cette bande dessinée vous rappellera aussi probablement Mon bel oranger, de José Mauro de Vasconcelos. C’est un livre qui m’avait beaucoup touché quand je l’avais lu, enfant. Chagrin dans le ciel me fait vivre aujourd’hui les mêmes émotions. C’est très fort. Et en plus, par chance, ça finit bien.
 

Par Sylvestre, le 10 juillet 2007

Publicité