Au cœur des ténèbres

Charles Marlow, jeune officier de marine, rêve de grands espaces, de l’Afrique et de ses comptoirs. Engagé par une compagnie belge qui exploite l’ivoire, il débarque bientôt au Congo afin de remplacer un directeur inefficace.
Une fois arrivé sur place, sa mission change. Il doit retrouver en plein cœur de la jungle un autre directeur : Kurtz. De bien étranges histoires trainent sur ce dernier, il est le plus grand pourvoyeur de la compagnie et pourtant, on le dit malade, et ses actions font craindre la folie.

Par olivier, le 12 mars 2014

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Notre avis sur Au cœur des ténèbres

Après nous avoir subjugués avec Le joueur, une adaptation de Dostoïevski, Stéphane Miquel et Loïc Godart reviennent avec cette adaptation d’une longue nouvelle de Joseph Conrad.

Alors que Marlow s’enfonce de plus en plus au cœur de la jungle remontant péniblement le fleuve vers Kurtz dans une languissante chaleur, dans cet environnement presque hypnotique ou la perte de repères entraine l’esprit dans de dangereux vagabondages, l’absurdité de la situation, la sensation d’irréel commence à corroder ses certitudes.
Ce voyage physique, au rythme syncopé du moteur asthmatique du bateau n’est que le vecteur d’un voyage initiatique, une plongée dans le primitif et original continent, un voyage vers ce que l’homme a de plus sauvage, de plus profondément enraciné sous le vernis de la civilisation.
A la frontière de la raison et de la folie, avec des passages tellement intenses qu’un désagréable frisson effleure parfois la peau, Stéphane Miquel reprend la course de Marlow qui se retrouve bien loin de ses rêves, confronté à de petits employés de la compagnie, de ces hommes souvent inadaptés à leur société d’origine et qui se retrouvent imbus d’une civilisation méprisant et avilissant les indigènes.

Il n’est pas possible de lire cet album sans retrouver dans un recoin de sa mémoire les images, la musique et cette voix off, obsédante d’Apocalypse Now de Coppola qui s’est inspiré lui aussi de cette nouvelle.

Avec un dessin qui n’est pas sans évoquer par instants celui d’Hugo Pratt, Loïc Godart installe une ambiance de plus en plus lourde et pesante. Sa colorisation, en lavis d’ocre et de marron, estompe une réalité et des visions qui seraient difficiles a supporter avec un dessin réaliste, tout en accompagnant cette descente aux enfers.
L’alternance majoritaire de cinq et six cases par planche dans ce petit format crée une densité narrative encore accentuée par cette voix off, ce récitatif obsédant, à la fois conscience et mémoire de Marlow.

La collection Noctambule sous la direction de Clotilde Wu continue à mettre à l’honneur des œuvres fortes de la littérature.

Par Olivier, le 12 mars 2014

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