Berceuse Electrique

Dans une Amérique uchronique, mélange détonnant d’années 50 et de futur proche, un privé gominé, Ray Banana, se débat dans un polar noir entre une femme fatale Elroyienne et une secte messianique, sorte de croisement entre les raeliens et la scientologie, aidé d’une femme de chambre et de quelques compagnons de beuverie. Inutile de résumer l’histoire, imaginez que vous projetiez les héros du faucon maltais dans un épisode d’X-Files retouché par Lynch et vous y êtes.

Par TITO, le 1 janvier 2001

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Toute la BD, que de la BD !

2 avis sur Berceuse Electrique

Autant le dire, je n’ai pas été emballé d’entrée de jeu. Moi les romans noirs et les privés mystérieux, ça me gonfle ; Chandler et Elroy me barbent autant que les 3 derniers XIII. Mais comme j’avais promis au patron de faire une critique, j’ai fait un effort.

Et cet effort a été grandement récompensé. D’abord, je me suis rendu compte progressivement que l’intrigue était loin d’être Tintinienne comme je m’y attendais : au contraire on plonge avec délice dans des méandres tortueux, juste ce qu’il faut, et le héros, à la fois super-privé et looser invétéré (bloqué dans une chambre d’hôtel où il a pris la place d’un vieillard aveugle parce qu’il a déchiré son pantalon, il escalade 2 étages pour ne pas avoir à traverser le hall de l’hôtel en caleçon) tente, par amour, par fierté, de se débattre comme il peut…

Ensuite, je me suis aperçu que j’avais été un peu vite sur le début. Loin d’être la mise en place laborieuse que tout polar noir se doit d’imposer à son public, comme une épreuve initiatique pour le lecteur qui ne peut apprécier le roman que lorsqu’il s’est tapé 200 pages de malheurs éthyliques dans Manhattan (et d’ailleurs, j’y vois un clin d’œil , Ray Banana s’endort lors d’un rite initiatique particulièrement codifié…), c’est en fait la présentation d’un monde décalé, uchronique et intemporel. Je ne vous en ferai pas une description détaillée ici, la préface de Gérard Lenne le faisant avec un grand talent, mais cette réalité alternative est à la fois un fourmillement de clins d’œil (Elmo Fosley, je suppose fruit d’une contraction entre Elmo Lewis et Elvis Presley, a pour tube Black and White Shoes, dérivé étonnant de Blue Suede Shoes) et un paradoxe complet, faisant qu’il est impossible de savoir si l’on se trouve dans des années 50 pleines d’un anti bolchevisme primaire ou en 2010, à la veille de rencontres intergalactiques prometteuses…

En résumé, Casterman nous permet de découvrir un trésor méconnu (enfin, pour moi, pardonnez mon inculture) de la BD, qu’il convient de savourer, et probablement de relire pour bien prendre la mesure de la force de l’œuvre. Sans oublier la superbe préface, qui montre avec brio en quoi cet ouvrage a influencé le monde de la BD, notamment au travers de la contribution de Ted Benoît au revival de Blake et Mortimer….

A lire en écoutant : JJ Cale, Shades (chapitres 1 et 2). Jefferson Airplane, White Rabbit and other Hits (chapitres 3 et ultérieurs)

Par TITO, le 15 septembre 2002

Longtemps je me suis dit que l’école de la Ligne Claire était une école très rigoureuse, très classique, à l’image des œuvres maitresses du genre que sont « Tintin » ou « Black et Mortimer » ! En découvrant le travail de Ted Benoit avec son incroyable Ray Banana, je découvrais un autre aspect de ce mouvement, une fantaisie et un sens du délire qui transporte le lecteur vers des mondes complètement en marge et particulièrement cyniques ! J’ai entre temps découvert les albums de « Leon-la-terreur » et surtout le boulot de Chaland (je suis sur qu’il y a bien d’autres exemples de ce genre en plus), un univers décalé, savoureux !
La Ligne Claire !
Je suis vraiment un fan de ce genre, cette pureté, mais moins de l’aspect justement trop classique. C’est pourquoi le dessin de Ted Benoit est agréable, non seulement il est incroyablement « propre » mais en plus il est ultra référencé et donc tres agréable à regarder !
Ray Banana.
Ce héros est un pur looser bien charismatique, mais tellement ridicule parfois ! Benoit lui a donné le look de Clark Gable, l’attitude un peu désenchantée à la Hammett, les nanas le manipulent, il tente de découvrir le fin fond de l’histoire et se perd un peu dans les méandres de tout ce fatras. C’est un régal ! L’auteur n’épargne à aucun moment ce personnage et n’hésite pas à le confronter à tout un tas de situations hallucinante !
J’ai rencontré ce pesronnage par le biais d’illustration d’abord, et très vite il est devenu le représentant d’un esprit un peu marginal dans cette école franco belge !

Cette histoire démarre vraiment très vite, comme un bon polar style Chandler ou justement Ellroy, mais c’est suffisamment loufoque pour qu’on comprenne tout de suite l’esprit de ce qui va suivre ! Néanmoins il y a une vraie intrigue, un vrai suspence et une vraie fin, simplement le déroulement du récit est quand même bien barré !

Si vous voulez entrer dans cet album et suivre ce Ray Banana bien allumé n’hésitez plus et profitez de la réédition de Casterman !

Par FredGri, le 5 septembre 2003

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