Une enfance algérienne

C’est dans une totale insouciance que les petits Paul, Pierre et Bachir (respectivement juif, chrétien et musulman) ont passé leur enfance à jouer ensemble dans une Algérie paradisiaque. Mais les "événements" ont changé le pays, et la sécurité des trois gamins n’étant plus assurée, leurs parents ont fini par se décider à quitter le pays…
 

Par sylvestre, le 9 février 2014

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Notre avis sur Une enfance algérienne

 
La donne de départ apparaîtrait fort peu originale, trop cousue de fil d’or, si elle était celle d’un simple joli conte : trois jeunes héros, trois confessions religieuses différentes et pourtant une forte amitié au-dessus tout cela. Classique, non ?! Ce genre de choses, on l’a en effet vu maintes et maintes fois : dans Meilleurs vœux de Mostar de Frano Pedruša où les trois héros amis sont des enfants croate, bosniaque et serbe que les combats interethniques vont séparer ; dans Roméo et Juliette où – d’après les parents des intéressés – il y a incompatibilité de classes sociales ; dans ces histoires où sont amis l’Afrikaner et le Noir, ou le juif et le nazi, etc, etc… Mais ces trois jeunes enfants épargnés, Paul, Pierre et Bachir, ces trois innocences préservées de la folie des adultes, s’ils sont des personnages de fiction, représentent forcément des personnes ayant réellement existé et ayant pu traverser elles aussi, de la même manière, l’historique Algérie française…

Entre bande dessinée et livre illustré, Au nord-est d’Arzew nous raconte la fin d’un rêve politique français en nous faisant vivre les choses côté peuple et à hauteur d’enfants. Paul, Pierre et Bachir sont encore très jeunes quand le vent tourne, quand les militaires viennent défigurer leurs paysages. Ils ont l’âge où l’on contourne les interdits sans prendre la mesure des dangers qu’ils encourent en les bravant. Mais ils sont plutôt protégés et mis à l’écart, ce qui fait que le récit reste empreint d’innocence et garde au meilleur la part belle : si des bombes explosent, on ne verra ni sang ni quoi que ce soit de traumatisant. Cet "optimisme de genre" transparaît aussi dans le dessin. Simple, quasi enfantin, il est mis en valeur par de très lumineuses couleurs à l’aquarelle. Côté narration graphique et mise en page, on observera différents choix intéressants : des vignettes "morcelées" (voir le visage sur l’extrait présenté sur cette fiche) ou des traits – séparant les vignettes, il n’y a pas d’espaces inter iconiques – prolongés pour devenir des contours dans les dessins…

Dans Au nord-est d’Arzew, le scénariste Alain Bonet refait vivre ses propres souvenirs de jeunesse. Il livre ainsi un récit très personnel et rend hommage à l’Algérie qu’il a tant aimée tout en rappelant à qui sait lire entre les lignes que chaque recoin de la planète est un paradis dès lors qu’il est en paix.
 

Par Sylvestre, le 9 février 2014

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