Asphalt blues

A cause certainement d’une enfance très difficile qui l’a ancré depuis dans une incertitude perpétuelle, Mickael se laisse porter par les évènements. Cette liberté et la frivolité qu’il s’octroie n’est pas du goût de Nina, sa compagne depuis deux ans, si bien qu’elle a décidé, après avoir entendu les sempiternelles promesses de changement, de mettre un terme à leur relation. Treize ans plus tard, Nina a refait sa vie. Styliste de profession, elle vit avec Timothy qui assure en tant que porte-parole gouvernemental le lien entre la Société Techeco et les instances dirigeantes. Celui-ci est préoccupé par une actualité brulante qui égratigne l’image de l’entreprise dont il défend les intérêts. Mais aussi, il ne supporte plus le fait de ne plus voir Nina et est gagné par la jalousie. De son côté, Mickael a des déboires avec sa compagne Hélène. Cette dernière ayant eu un accident grave de la circulation, elle doit mettre entre parenthèse sa carrière de danseuse. Mais, elle cache en elle un mal plus profond qui la tiraille et sur lequel Mickael voudrait avoir des explications. Est-ce que le malaise affectif qui sévit dans ces deux couples serait de nature à les désunir et à susciter des actions peu recommandables ?

Par phibes, le 23 janvier 2022

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Notre avis sur Asphalt blues

Nous connaissons Jaouen Salaün pour ces superbes travaux réalisés en tant que dessinateur dans la série Carthago Adventures (Tome 1 – Bluff Creek) en 2011 et en tant qu’auteur complet dans sa saga Elecboy en 2021. Formaté semble-t-il pour travailler dans le fantastique, l’artiste revient sur le devant de la scène pour nous intéresser à un one-shot « sentimental » futuriste psychologiquement dense.

Nous plongeant à prime abord dans le relationnel tendu du couple formé par Nina et Mikael, et de la désunion qui suit leur mésentente, nous sommes appelés à suivre en parallèle leurs destinées séparées, un double parcours qui passe inévitablement par leurs vies sentimentales treize années après leur séparation. A ce jeu scénaristique qui trahit un découpage averti, on peut considérer que Jaouen Salaün fait de l’excellent boulot. Se focalisant efficacement sur chaque couple, l’artiste nous dresse des tranches de vie qui, imparablement, dénotent dans des efforts narratifs simples une tension palpable et qui, malgré tout, entretient subtilement un lien entre elles.

Cette évocation sentimentale houleuse qui a tendance à verser un tantinet dans le thriller écologique détient ces ingrédients qui vous envoutent et qui vous amène dans des circonvolutions auréolées, in fine, de bonnes sensations. A cet égard, on saluera le choix des personnages et surtout le travail sur leur profondeur affective, leur contemplation momentanée, qui rendent remarquablement efficients leurs tourments, leur envie de sauver ce qui semble à priori perdu, leurs exactions désespérées et qu’en grand curieux, on se plait à suivre pour voir comment tout ça va se régler.

Au niveau du dessin, Jaouen Salaün vient ici nous prendre au dépourvu en nous offrant un travail très coloré inédit chez lui et qui se veut basé sur un traitement numérique maîtrisé. Force est de constater que le résultat est d’une beauté rare, mettant en évidence des décors futuristes particulièrement léchés. Les personnages, crédibles, ne sont certainement pas en reste car l’artiste a traité leur bonhomie avec beaucoup de tac, se permettant au passage d’emprunter des traits à des acteurs américains (tel Robert Redford et Paul Newman jeunes). Leur beauté est de fait fascinante.

Une très belle romance tourmentée menée avec brio par un auteur complet qui n’a pas fini de nous surprendre agréablement.

Par Phibes, le 23 janvier 2022

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